Textes
Régimes matrimoniaux : Décharge de responsabilité solidaire : nouveau recours gracieux pour les époux ou partenaires séparés
Lien : L. n° 2024-494, 31 mai 2024, art. 4, 5 et 6 : JO 1er juin 2024
La loi n° 2024-494 du 31 mai 2024, promulguée pour renforcer l’équité patrimoniale au sein des familles, introduit des modifications notables en matière de régimes matrimoniaux et de solidarité fiscale. Plus particulièrement, les articles 4, 5 et 6 de cette loi, publiés au Journal Officiel le 1er juin 2024, apportent des changements significatifs en matière de décharge de responsabilité solidaire pour les époux ou partenaires de PACS en situation de séparation. Ces dispositions répondent à un besoin croissant de justice fiscale dans le contexte des relations familiales.
Traditionnellement, le principe de solidarité fiscale entre époux ou partenaires de PACS impose que chacun soit responsable des dettes fiscales de l’autre, même en cas de séparation de fait ou de procédure de divorce en cours. Cette obligation a souvent conduit à des situations injustes où un conjoint ou partenaire pouvait être tenu responsable des dettes fiscales contractées par l’autre, bien après la cessation de la vie commune. La nouvelle loi vise à rectifier cette inégalité en permettant aux personnes séparées de bénéficier d’une décharge de cette responsabilité solidaire sous certaines conditions.
Les articles 4, 5 et 6 de la loi n° 2024-494 introduisent un recours gracieux pour les époux ou partenaires séparés. Ce mécanisme permet de solliciter une décharge partielle ou totale de la solidarité fiscale, à condition de prouver la cessation de la vie commune et d’établir que les dettes fiscales sont le résultat des actes ou de la gestion de l’autre conjoint ou partenaire.
Le processus de demande de décharge de responsabilité solidaire est encadré par des critères rigoureux. L’époux ou le partenaire séparé doit fournir des preuves de la séparation, telles que des documents attestant de la résidence séparée, une procédure de divorce ou de dissolution de PACS en cours, ou tout autre élément démontrant la fin de la vie commune. De plus, il doit démontrer que les dettes fiscales concernées ont été contractées par l’autre conjoint ou partenaire sans son consentement ou sans sa connaissance.
Le recours gracieux pour la décharge de responsabilité solidaire est conçu pour être accessible et rapide, afin de ne pas prolonger les situations d’injustice financière. Les autorités fiscales sont tenues de répondre à la demande dans un délai de trois mois à compter de la réception du dossier complet. En cas de refus ou de silence de l’administration, le demandeur peut saisir le tribunal administratif pour contester la décision.
Il est intéressant de noter que cette réforme s’inscrit dans un mouvement plus large de révision des règles de solidarité financière au sein des familles. La jurisprudence récente a montré une tendance à reconnaître les spécificités de chaque situation familiale et à adapter l’application des principes de solidarité en conséquence. Par exemple, des décisions récentes ont déjà permis une certaine souplesse dans l’application de la solidarité fiscale en cas de séparation de fait prolongée, mais sans cadre légal précis. La loi n° 2024-494 vient donc formaliser et élargir ces possibilités, offrant ainsi une meilleure protection aux personnes en situation de vulnérabilité financière après une séparation.
La loi n° 2024-494 du 31 mai 2024 marque une étape importante vers une plus grande justice patrimoniale au sein des familles en France. Elle offre une voie de recours pour les époux ou partenaires séparés, permettant de limiter les effets potentiellement dévastateurs de la solidarité fiscale dans un contexte de séparation. Toutefois, il reste à observer comment ces nouvelles dispositions seront mises en œuvre par les autorités fiscales et comment elles seront interprétées par les tribunaux administratifs. Ces évolutions ouvrent la porte à de nouvelles réflexions sur l’équilibre entre responsabilité financière et justice patrimoniale dans le cadre familial.
État civil : La dématérialisation des documents d’état civil des Français de l’étranger est pérennisée
Lien : L. n° 2024-538, 13 juin 2024 : JO 14 juin 2024
La loi n° 2024-538 du 13 juin 2024, publiée au Journal Officiel le 14 juin 2024, marque une avancée pour les Français résidant à l’étranger en confirmant la pérennisation de la dématérialisation des documents d’état civil. Cette législation fait suite à une période d’expérimentation visant à faciliter l’accès et la gestion des actes d’état civil pour les expatriés français.
Depuis plusieurs années, les processus administratifs pour les Français vivant hors de France ont souvent été perçus comme complexes et longs. Les démarches pour obtenir des documents essentiels, tels que les actes de naissance, de mariage ou de décès, pouvaient nécessiter des déplacements ou des envois postaux chronophages. L’initiative de dématérialisation, initialement testée, a été mise en place pour répondre à ces défis en permettant l’accès électronique aux documents d’état civil.
Les principaux objectifs de la loi n° 2024-538 sont multiples : simplifier l’accès aux services publics pour les Français de l’étranger, réduire les délais de traitement, et améliorer l’efficacité administrative. En pérennisant cette dématérialisation, le législateur entend moderniser l’administration publique en l’adaptant aux réalités numériques contemporaines.
Durant la phase expérimentale, plusieurs mesures ont été testées avec succès. Les consulats français ont joué un rôle clé dans cette transition, en collaborant avec le Service Central d’État Civil (SCEC) pour offrir des services en ligne sécurisés. Ces services ont permis aux expatriés de demander et de recevoir des copies numériques de leurs actes d’état civil via des plateformes en ligne dédiées. La loi n° 2024-538 vient donc institutionnaliser ces pratiques, assurant leur continuité et leur extension.
Les articles clés de cette loi définissent les modalités pratiques de cette dématérialisation. Ils stipulent que tous les actes d’état civil peuvent désormais être demandés et délivrés par voie électronique. La sécurité et la confidentialité des données sont également au cœur de ces dispositions, avec des protocoles stricts pour la protection des informations personnelles et l’authentification des utilisateurs.
Un autre aspect crucial de cette législation est l’accent mis sur l’interopérabilité des systèmes d’information entre les différentes administrations françaises et les postes consulaires. Cela permet une meilleure coordination et un échange de données plus fluide, réduisant ainsi le risque de doublons ou de pertes d’information. Cette interopérabilité est essentielle pour garantir que les documents électroniques soient reconnus et acceptés de manière uniforme, tant en France qu’à l’étranger.
L’un des défis principaux de cette transition réside dans l’accès aux technologies pour tous les expatriés. Bien que la majorité des Français de l’étranger puissent bénéficier des services numériques, certains peuvent rencontrer des difficultés d’accès à l’internet ou aux compétences numériques nécessaires. La loi prévoit des mesures d’accompagnement pour ces personnes, y compris des services d’assistance en ligne et des formations à l’utilisation des plateformes numériques.
De plus, l’impact environnemental de cette dématérialisation ne doit pas être sous-estimé. En réduisant la nécessité d’imprimer et d’expédier des documents, cette réforme contribue à une diminution significative de l’empreinte carbone des services administratifs. Cette dimension écologique renforce l’attrait de la dématérialisation comme une solution durable.
La mise en œuvre de cette loi n° 2024-538 représente une étape cruciale vers une administration plus moderne et plus accessible pour les Français de l’étranger. Cependant, elle soulève également des questions importantes sur l’avenir de l’administration publique en général. Comment garantir que la dématérialisation ne crée pas de nouvelles formes d’inégalité d’accès aux services publics ? Quelles mesures supplémentaires pourraient être nécessaires pour assurer la sécurité et la confidentialité des données à l’ère numérique ? Enfin, dans quelle mesure cette approche peut-elle être étendue à d’autres services administratifs pour améliorer encore l’efficacité et l’accessibilité pour tous les citoyens, qu’ils vivent en France ou à l’étranger ?
Ces interrogations appellent à une réflexion continue sur l’équilibre entre innovation numérique et équité d’accès aux services publics, tout en maintenant la protection rigoureuse des données personnelles dans un monde de plus en plus connecté.
Urbanisme : Mutualisation nationale des espaces naturels pour projets d’intérêt majeur
Lien : A. n° TREL2410389A, 31 mai 2024 : JO 9 juin 2024
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, communément appelée « Loi Climat et Résilience », a marqué un tournant dans la politique environnementale et d’urbanisme en France. Parmi ses nombreuses dispositions visant à lutter contre le dérèglement climatique et à renforcer la résilience des territoires, l’introduction de la mutualisation nationale des espaces naturels pour les projets d’intérêt majeur constitue une avancée significative. Cette approche, précisée par l’arrêté n° TREL2410389A du 31 mai 2024 et publié au Journal Officiel le 9 juin 2024, vise à concilier les besoins de développement économique avec la préservation des écosystèmes sensibles.
L’objectif principal de la mutualisation nationale des espaces naturels est de créer un cadre réglementaire qui permette de réserver et de gérer des espaces naturels à l’échelle nationale, afin de les affecter à des projets reconnus d’intérêt majeur tout en minimisant leur impact environnemental. Cette démarche repose sur l’idée que certains projets, bien que potentiellement nuisibles pour des espaces spécifiques, peuvent être indispensables au niveau national en termes de développement économique ou de transition énergétique.
Le concept de mutualisation s’articule autour de plusieurs axes clés. Premièrement, il s’agit de cartographier et de classifier les espaces naturels sur l’ensemble du territoire national en fonction de leur importance écologique et de leur vulnérabilité. Cette classification permet d’identifier les zones qui peuvent être mises en commun pour accueillir des projets tout en assurant une compensation écologique adéquate.
Deuxièmement, la mutualisation implique la création d’un mécanisme de gouvernance centralisé qui coordonne l’utilisation de ces espaces. Ce mécanisme est chargé de veiller à ce que les projets d’intérêt majeur soient planifiés de manière à optimiser l’utilisation des ressources naturelles tout en respectant les engagements de la France en matière de biodiversité. Le rôle des collectivités locales et des acteurs régionaux est également crucial dans ce processus, car ils fournissent des informations précises et contribuent à la gestion des espaces au niveau local.
Troisièmement, la mutualisation des espaces naturels comprend des mesures strictes de compensation écologique. Chaque projet d’intérêt majeur doit non seulement démontrer son caractère indispensable, mais aussi prévoir des actions compensatoires pour restaurer ou créer des habitats naturels de valeur écologique égale ou supérieure à celle des espaces utilisés. Cela peut inclure la réhabilitation de sites dégradés, la création de corridors écologiques ou le soutien à des programmes de conservation.
La mise en œuvre de cette mutualisation présente des défis importants. L’un des principaux est de garantir que les compensations écologiques soient effectivement réalisées et qu’elles produisent les bénéfices attendus pour la biodiversité. Il est essentiel que les mesures compensatoires soient non seulement théoriques mais aussi opérationnelles et durables dans le temps. De plus, la centralisation de la gouvernance doit être équilibrée avec la participation active des parties prenantes locales pour assurer une gestion harmonieuse des espaces naturels mutualisés.
L’arrêté n° TREL2410389A du 31 mai 2024 apporte des précisions supplémentaires sur les modalités d’application de cette mutualisation. Il détaille les critères de sélection des espaces naturels, les mécanismes de financement des mesures compensatoires et les responsabilités des différents acteurs impliqués. Ce cadre réglementaire vise à renforcer la transparence et l’efficacité du processus, en facilitant la coordination entre les divers niveaux de gouvernance et en assurant que les projets bénéficient d’une évaluation rigoureuse de leur impact environnemental.
Un exemple concret de l’application de cette mutualisation pourrait être l’aménagement de grandes infrastructures de transport ou la construction de complexes énergétiques renouvelables, qui nécessitent souvent des espaces vastes et peuvent avoir des impacts significatifs sur l’environnement local. Grâce à la mutualisation, ces projets peuvent être réalisés dans des zones pré-identifiées, où les impacts sont gérés de manière proactive et compensés par des actions écologiques planifiées.
La mutualisation nationale des espaces naturels pour les projets d’intérêt majeur représente une stratégie innovante pour équilibrer le développement économique avec la préservation de l’environnement. Elle souligne l’importance de la planification à long terme et de la gestion coordonnée des ressources naturelles. Cependant, cette approche pose également des questions importantes sur la manière dont nous priorisons les projets d’intérêt majeur et assurons la véritable compensation des impacts écologiques. Comment peut-on garantir que les intérêts économiques ne prennent pas le dessus sur la protection des écosystèmes ? Quels mécanismes supplémentaires pourraient être mis en place pour surveiller et évaluer l’efficacité des mesures compensatoires dans le temps ? Ces questions méritent une réflexion approfondie alors que nous avançons vers une intégration plus étroite de la gestion écologique dans le processus de développement urbain et infrastructurel.
Urbanisme : Modification de diverses dispositions relatives à l’évaluation environnementale des projets
Lien : D. n° 2024-529, 10 juin 2024 : JO 11 juin 2024
Le décret n° 2024-529 du 10 juin 2024, publié au Journal Officiel le 11 juin 2024, apporte des modifications significatives aux dispositions relatives à l’évaluation environnementale des projets d’urbanisme en France. Ce texte vise à renforcer les exigences et les procédures d’évaluation pour mieux anticiper et atténuer les impacts des projets sur l’environnement.
Les principales modifications introduites par ce décret concernent la révision de la nomenclature de l’évaluation environnementale, qui détermine les types de projets nécessitant une étude d’impact environnemental. Ces changements visent à mieux refléter les réalités actuelles des projets d’urbanisme et les préoccupations environnementales contemporaines.
La première rubrique modifiée concerne les projets de construction et d’aménagement urbain. Cette catégorie inclut désormais une gamme élargie de projets, tels que les grands complexes résidentiels, les infrastructures de transport urbain et les projets de rénovation urbaine. Les critères d’évaluation se concentrent sur la densité des constructions et leur impact sur les ressources locales, comme l’eau et l’énergie, ainsi que sur les émissions de gaz à effet de serre.
Les projets d’infrastructures de transport constituent la deuxième rubrique révisée. Les projets tels que les autoroutes, les voies ferrées et les aéroports doivent désormais répondre à des critères plus stricts. L’évaluation inclut une analyse détaillée des impacts sur la biodiversité, la qualité de l’air et les nuisances sonores. Les porteurs de projet doivent démontrer des mesures d’atténuation pour minimiser ces impacts.
Pour les projets industriels, qui constituent la troisième rubrique, le décret impose une évaluation approfondie des risques de pollution et de contamination, en particulier pour les installations impliquant des procédés chimiques ou énergétiques. Ces projets doivent prévoir des systèmes de surveillance continue et des plans de réponse en cas d’incident environnemental.
La quatrième rubrique concerne les projets d’énergie renouvelable. Bien que généralement favorisés pour leurs bénéfices environnementaux, les parcs éoliens, solaires et hydroélectriques doivent prouver qu’ils n’entraînent pas de dommages significatifs aux habitats naturels et qu’ils s’intègrent harmonieusement dans le paysage.
Le décret n° 2024-529 introduit également des procédures renforcées pour la participation du public et la transparence des évaluations environnementales. Les autorités compétentes sont désormais tenues d’organiser des consultations publiques plus larges et inclusives, permettant aux communautés locales, aux ONG et aux autres parties prenantes de s’exprimer sur les projets et leurs impacts potentiels. Les résultats des évaluations environnementales et les commentaires du public doivent être publiés en ligne pour garantir un accès libre à l’information.
Ces modifications s’inscrivent dans une dynamique de renforcement de la législation environnementale française, alignée sur les directives européennes et les engagements internationaux en matière de développement durable. Elles visent à promouvoir une planification urbaine et industrielle plus respectueuse de l’environnement, en intégrant les impératifs écologiques dès les phases initiales des projets.
Toutefois, ces évolutions réglementaires posent des défis aux porteurs de projets. Les exigences accrues en matière d’évaluation environnementale peuvent entraîner des délais supplémentaires et des coûts accrus. Cela nécessite une préparation minutieuse et une intégration précoce des considérations environnementales dans le processus de planification.
Le décret n° 2024-529 du 10 juin 2024 représente donc une étape importante vers une gestion plus rigoureuse et plus transparente des impacts environnementaux des projets d’urbanisme. En renforçant les critères d’évaluation et en augmentant la participation publique, cette réforme vise à garantir que les projets contribuent de manière positive au développement durable.
Cependant, des questions subsistent quant à la mise en œuvre pratique de ces nouvelles dispositions et leur impact sur la dynamique des projets d’urbanisme en France. Quels seront les effets à long terme de ces changements sur la qualité de vie des citoyens et sur la préservation de l’environnement ? Comment les autorités locales et les porteurs de projets s’adapteront-ils à ces nouvelles exigences ? Ces interrogations demeurent ouvertes et nécessitent une attention continue.
Entreprise : La loi visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France est publiée
Lien : L. n° 2024-537, 13 juin 2024 : JO 14 juin 2024
La loi n° 2024-537 du 13 juin 2024, publiée au Journal Officiel le 14 juin 2024, introduit des mesures importantes pour renforcer le financement des entreprises françaises et améliorer l’attractivité de la France en tant que destination d’investissements. Cette législation, adoptée dans un contexte de compétitivité économique accrue à l’échelle mondiale, vise à soutenir la croissance des entreprises de toutes tailles, des start-ups aux grandes entreprises établies, en facilitant leur accès aux capitaux et en créant un environnement plus propice à l’innovation et à l’expansion.
L’un des piliers de cette loi est la création de nouveaux instruments financiers pour encourager l’investissement dans les entreprises françaises. Ces outils incluent des incitations fiscales pour les investisseurs individuels et institutionnels, ainsi que des mesures pour renforcer le capital-risque. Par exemple, la loi prévoit des crédits d’impôt pour les investisseurs particuliers qui injectent des fonds dans les petites et moyennes entreprises (PME) innovantes. Ces incitations sont conçues pour stimuler l’apport de capital privé, crucial pour le développement des jeunes entreprises à fort potentiel de croissance.
En parallèle, la loi n° 2024-537 met en place des mécanismes pour simplifier et rationaliser l’accès au financement public. Elle étend le rôle de la Banque Publique d’Investissement (BPI) en augmentant ses capacités de garantie et de co-investissement, permettant ainsi à un plus grand nombre d’entreprises de bénéficier de financements publics. De plus, elle facilite les procédures pour les entreprises cherchant à obtenir des subventions et des prêts à des conditions avantageuses, notamment dans les secteurs stratégiques tels que la transition énergétique et la numérisation.
La législation introduit également des réformes pour accroître l’attractivité de la France comme destination d’investissements étrangers. Cela inclut des mesures visant à simplifier le cadre réglementaire et à réduire les obstacles bureaucratiques qui peuvent dissuader les investisseurs étrangers. Par exemple, les procédures de création d’entreprise et d’obtention de permis de construire sont rationalisées, et de nouvelles voies rapides pour l’approbation des projets d’investissement sont établies. Ces réformes visent à faire de la France un choix plus attrayant pour les entreprises cherchant à établir ou à étendre leurs opérations en Europe.
Un autre aspect important de la loi est le renforcement des infrastructures de soutien aux entreprises, telles que les incubateurs et les clusters technologiques. La loi prévoit des subventions et des incitations fiscales pour la création et le développement de ces infrastructures, en particulier dans les régions moins développées économiquement. Ces initiatives sont conçues pour favoriser l’innovation et créer des écosystèmes dynamiques où les entreprises peuvent prospérer et collaborer efficacement.
En outre, la loi n° 2024-537 met l’accent sur la promotion de l’entrepreneuriat et de l’innovation. Elle introduit des programmes de formation et de mentorat pour les entrepreneurs, ainsi que des mesures pour encourager la recherche et le développement (R&D) au sein des entreprises. Les entreprises qui investissent dans la R&D bénéficient de crédits d’impôt améliorés, et de nouvelles subventions sont disponibles pour les projets de recherche collaborative entre les entreprises et les institutions académiques.
La protection de la propriété intellectuelle est également renforcée, avec des procédures simplifiées pour l’enregistrement des brevets et une assistance accrue pour les PME dans la gestion de leurs actifs intellectuels. Ces mesures visent à encourager l’innovation en garantissant que les entreprises puissent protéger et capitaliser sur leurs idées novatrices.
Enfin, la loi vise à renforcer la compétitivité globale de l’économie française en réduisant les charges fiscales et sociales sur les entreprises. Elle introduit des réductions de cotisations sociales pour les entreprises qui embauchent dans les secteurs stratégiques ou qui investissent dans des régions à fort taux de chômage. De plus, des ajustements fiscaux sont prévus pour alléger le fardeau des entreprises, notamment en ce qui concerne l’impôt sur les sociétés et les taxes sur la production.
Ces mesures combinées visent à créer un environnement plus favorable pour les entreprises en France, en facilitant leur accès aux financements, en simplifiant les procédures administratives et en encourageant l’innovation et l’investissement. La mise en œuvre de cette législation soulève cependant des questions importantes. Comment ces nouvelles mesures affecteront-elles la compétitivité à long terme des entreprises françaises ? Dans quelle mesure réussiront-elles à attirer les investissements étrangers ? Et comment l’équilibre entre les incitations pour les entreprises et les obligations fiscales et sociales sera-t-il maintenu pour assurer une croissance durable et équitable ?
Ces questions resteront au cœur des débats alors que la France navigue vers une économie de plus en plus globale et interconnectée.
Fiscalité : Véhicules de capital-investissement : mise à jour des obligations déclaratives et définition des modalités de l’option
Lien : D. n° 2024-532, 10 juin 2024 : JO 12 juin 2024
Le décret n° 2024-532 du 10 juin 2024, publié au Journal Officiel le 12 juin 2024, introduit des précisions importantes sur les obligations déclaratives et les modalités de l’option pour le report d’imposition des plus-values réalisées par les particuliers lors de l’apport de titres à une société qu’ils contrôlent. Cette mise à jour vise à clarifier le cadre fiscal pour ces opérations complexes, favorisant ainsi la transparence et la conformité tout en encourageant l’investissement entrepreneurial.
Lorsque des particuliers apportent des titres à une société qu’ils contrôlent, ils ont la possibilité de différer l’imposition des plus-values générées par cette opération. Le report d’imposition est soumis à plusieurs conditions strictes, visant à garantir que cette option est utilisée pour soutenir des investissements à long terme.
La première condition est que le cédant doit exercer un contrôle effectif sur la société bénéficiaire des titres. Ce contrôle est généralement défini par la détention directe ou indirecte de plus de 50 % des droits de vote ou du capital de la société. Cette condition assure que les titres apportés sont destinés à renforcer une structure sur laquelle le cédant a une influence directe.
Ensuite, le contribuable doit s’engager à conserver les titres reçus en échange de l’apport pendant une période minimale de trois ans. Cet engagement vise à encourager une approche d’investissement durable plutôt qu’une revente rapide.
Le choix de l’option pour le report d’imposition doit être notifié à l’administration fiscale dans les 30 jours suivant l’apport. Cette notification doit inclure des détails précis sur l’opération, tels que la nature et la valeur des titres apportés, ainsi que sur la société bénéficiaire. Cela permet à l’administration de suivre ces opérations de près et de s’assurer de leur conformité aux conditions de report d’imposition.
Les nouvelles obligations déclaratives mises en place par le décret obligent les contribuables à inclure dans leur déclaration annuelle de revenus des informations détaillées sur les titres apportés, l’état de l’engagement de conservation, et toute évolution significative dans la structure de l’entreprise bénéficiaire. Même sans cession, ces informations doivent être actualisées chaque année pour garantir la transparence auprès de l’administration fiscale.
En cas de cession des titres avant la fin de la période de trois ans, le contribuable doit notifier immédiatement l’administration fiscale et payer les impôts sur les plus-values différées. Cette obligation est conçue pour éviter les abus de la possibilité de report d’imposition.
Le décret précise également les méthodes de calcul des plus-values en cas de cession des titres après l’expiration de la période de conservation. Les valeurs des titres doivent être évaluées à la date de l’apport initial et ajustées en fonction des changements dans le capital de la société, tels que les réévaluations, les augmentations de capital et les distributions de dividendes. Ces précisions permettent d’assurer une évaluation juste et précise des plus-values lors de leur imposition.
L’harmonisation avec les directives fiscales européennes est également une composante essentielle de ce décret. Il veille à ce que les règles françaises sur le report d’imposition soient alignées avec les normes de l’Union européenne, en particulier pour les opérations de fusion, de scission et d’apport d’actifs. Cela garantit une application cohérente des règles fiscales pour les investisseurs opérant dans plusieurs pays européens.
Ces nouvelles dispositions visent à encourager l’investissement en apportant plus de clarté et de sécurité aux investisseurs particuliers. Cependant, elles imposent aussi des responsabilités accrues en matière de transparence et de conformité fiscale. Les contribuables doivent être vigilants et bien informés pour naviguer ces régulations et éviter des sanctions potentielles en cas de non-conformité.
L’impact de ces mesures sur la dynamique des investissements dans les entreprises contrôlées par des particuliers est encore à évaluer. Comment les investisseurs réagiront-ils à ces nouvelles exigences de report d’imposition ? Et dans quelle mesure ces régulations soutiendront-elles l’investissement à long terme dans les petites et moyennes entreprises tout en assurant la transparence fiscale et le respect des obligations déclaratives ? Ces questions demeurent essentielles pour comprendre les implications de ces nouvelles régulations sur l’économie française et son cadre fiscal.
Assurance : Conditions de valorisation et de rachat des unités de compte prévues dans les contrats d’assurance-vie et de capitalisation
Lien : D. n° 2024-539, 12 juin 2024 : JO 14 juin 2024
Le décret n° 2024-539 du 12 juin 2024, publié au Journal Officiel le 14 juin 2024, introduit des modifications importantes concernant les conditions de valorisation et de rachat des unités de compte dans les contrats d’assurance-vie et de capitalisation. Ce texte vise à moderniser et clarifier les règles applicables aux entreprises d’assurance, aux mutuelles, aux unions et aux institutions de prévoyance, afin de mieux protéger les assurés et d’adapter les pratiques aux évolutions du marché financier.
Les unités de compte (UC) sont des supports d’investissement adossés à divers actifs comme des actions, des obligations ou des fonds d’investissement, dont la valeur fluctue en fonction des marchés financiers. Ces unités permettent aux assurés de diversifier leur épargne, mais elles comportent également des risques liés aux variations de marché. Le décret n° 2024-539 précise les modalités de valorisation de ces unités et les conditions dans lesquelles les assurés peuvent exercer leur droit de rachat.
Le décret établit des règles plus strictes pour la valorisation des unités de compte. Les entreprises d’assurance et autres entités concernées doivent désormais utiliser des méthodes de valorisation rigoureuses et transparentes, fondées sur des prix de marché observables. Si ces prix ne sont pas disponibles, des modèles de valorisation internes peuvent être utilisés, à condition qu’ils soient approuvés par les autorités de régulation et que leur méthodologie soit clairement communiquée aux assurés. La valorisation doit être effectuée régulièrement, au moins une fois par semaine, pour refléter de manière précise les fluctuations du marché. Cette fréquence garantit que la valeur des unités de compte est à jour et que les assurés disposent d’informations précises pour prendre des décisions éclairées concernant leur épargne.
Le décret précise également les conditions dans lesquelles les assurés peuvent racheter leurs unités de compte. Il impose des délais maximums pour le traitement des demandes de rachat afin de maintenir une liquidité suffisante et une gestion efficace des fonds. Les entreprises d’assurance doivent traiter les demandes de rachat dans un délai de 30 jours ouvrables à compter de la réception de la demande complète. En cas de crise de marché ou de circonstances exceptionnelles pouvant affecter la liquidité des actifs sous-jacents, les entreprises d’assurance peuvent demander à l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) l’autorisation de suspendre temporairement les rachats. Cette suspension doit être justifiée par des raisons sérieuses et être limitée dans le temps pour minimiser l’impact sur les assurés.
Le décret renforce aussi les obligations d’information des entreprises d’assurance envers leurs clients. Les assurés doivent recevoir des informations claires et détaillées sur la composition, les risques et la performance des unités de compte. Ces informations doivent être fournies au moment de la souscription du contrat, lors de chaque valorisation, et avant toute opération de rachat. Les entreprises doivent également informer les assurés des frais associés aux unités de compte, y compris les frais de gestion et de transaction, et comment ces frais affectent la valeur de leur investissement. La transparence sur les frais permet aux assurés de comprendre les coûts associés à leur épargne et de comparer les différents produits disponibles sur le marché.
Le décret n° 2024-539 prévoit aussi des mesures de surveillance et de contrôle renforcées par les autorités de régulation. L’ACPR est chargée de veiller à ce que les entreprises d’assurance respectent les nouvelles règles de valorisation et de rachat des unités de compte. Elle peut procéder à des inspections et demander des rapports réguliers sur les méthodes de valorisation utilisées et sur le traitement des demandes de rachat. En cas de non-conformité, l’ACPR peut imposer des sanctions, allant de l’amende à la restriction des activités, voire au retrait de l’agrément. Ces mesures visent à garantir que les pratiques des entreprises d’assurance restent alignées avec les standards de transparence et de protection des assurés.
Ces nouvelles dispositions visent à améliorer la sécurité et la transparence des investissements en unités de compte dans les contrats d’assurance-vie et de capitalisation. Elles renforcent la protection des assurés en assurant une valorisation précise des actifs sous-jacents et en garantissant la possibilité de racheter les unités de compte dans des conditions raisonnables.
Les implications de ces régulations sur le marché de l’assurance-vie et de la capitalisation nécessitent une observation attentive. Les entreprises devront adapter leurs pratiques pour se conformer aux exigences accrues de transparence et de gestion des liquidités. Les assurés, de leur côté, bénéficieront d’une meilleure visibilité sur leurs investissements et d’une plus grande sécurité en matière de gestion de leurs épargnes. Comment ces changements affecteront-ils les préférences des épargnants pour les contrats d’assurance-vie ? Dans quelle mesure les nouvelles règles de valorisation et de rachat influenceront-elles la stratégie des entreprises d’assurance dans la gestion de leurs portefeuilles d’actifs ? Ces questions sont fondamentales pour comprendre les évolutions futures des produits d’assurance et de capitalisation.
Assurance : Fonds de garantie des assurances de dommages obligatoires : plafonds applicables et règles de constitution de la provision
Lien : D. n° 2024-523, 7 juin 2024 : JO 9 juin 2024
Le décret n° 2024-523 du 7 juin 2024, publié au Journal Officiel le 9 juin 2024, apporte des précisions essentielles concernant les plafonds applicables et les règles de constitution de la provision pour le Fonds de garantie des assurances de dommages obligatoires. Ce décret vise à encadrer plus strictement la gestion de ce fonds, assurant ainsi une plus grande stabilité financière et une meilleure protection des assurés.
Le Fonds de garantie des assurances de dommages obligatoires (FGADO) a pour mission de garantir l’indemnisation des sinistres en cas de défaillance d’une compagnie d’assurance. Ce mécanisme est particulièrement important pour les assurances obligatoires telles que l’assurance responsabilité civile automobile. Afin de garantir sa solvabilité et sa capacité à répondre à ses obligations, le FGADO doit constituer des provisions suffisantes et respecter des plafonds de garantie stricts.
Le décret n° 2024-523 fixe les plafonds applicables aux indemnisations versées par le FGADO. Ces plafonds sont essentiels pour limiter l’exposition financière du fonds et assurer une gestion prudente des ressources. Le montant maximal d’indemnisation par sinistre est désormais plafonné à 500 000 euros, sauf en cas de dommages corporels graves où le plafond peut être relevé jusqu’à 1 million d’euros. Cette différenciation permet de prendre en compte la gravité des sinistres tout en maintenant une limite financière raisonnable pour le fonds.
En ce qui concerne la constitution de la provision mentionnée au I de l’article 39, le décret précise les règles que doivent suivre les compagnies d’assurance. Les entreprises doivent désormais calculer leurs provisions sur la base des primes émises et des risques souscrits, en tenant compte de la sinistralité observée. La provision doit couvrir à tout moment les engagements pris par les compagnies d’assurance envers leurs assurés.
Le décret impose également aux compagnies d’assurance de constituer cette provision de manière progressive et prudente. Elles doivent effectuer des évaluations périodiques de leurs engagements et ajuster leurs provisions en conséquence. Cette approche dynamique vise à garantir que les provisions restent adaptées aux risques actuels et futurs.
Les règles de constitution de la provision incluent des exigences spécifiques concernant la transparence et la traçabilité. Les compagnies d’assurance doivent tenir des registres détaillés des calculs de provisions, incluant les méthodologies utilisées et les hypothèses sous-jacentes. Ces registres doivent être accessibles pour inspection par les autorités de régulation, qui peuvent vérifier la conformité des pratiques des compagnies d’assurance avec les exigences du décret.
Le décret n° 2024-523 renforce également la surveillance exercée par les autorités de régulation, notamment l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). L’ACPR est chargée de veiller à ce que les compagnies d’assurance respectent les nouveaux plafonds et les règles de constitution des provisions. Elle peut procéder à des contrôles réguliers et demander des rapports détaillés sur la gestion des provisions et la solvabilité des compagnies d’assurance.
En cas de non-conformité, l’ACPR dispose de plusieurs moyens d’action, allant de l’imposition de sanctions financières à des restrictions d’activité, voire au retrait de l’agrément. Ces mesures dissuasives sont destinées à garantir que les compagnies d’assurance adoptent une gestion prudente et responsable de leurs provisions.
Ces nouvelles dispositions ont pour objectif de renforcer la stabilité financière du Fonds de garantie des assurances de dommages obligatoires et de garantir une meilleure protection des assurés en cas de défaillance d’une compagnie d’assurance. Elles visent à assurer que les compagnies d’assurance disposent de réserves suffisantes pour couvrir leurs engagements, tout en maintenant une gestion transparente et responsable de leurs provisions.
Les impacts de ces nouvelles régulations sur le secteur des assurances et sur les assurés devront être surveillés. Les compagnies d’assurance devront ajuster leurs pratiques pour se conformer aux nouvelles exigences de provisionnement et de transparence. Les assurés, quant à eux, peuvent s’attendre à une plus grande sécurité en cas de sinistre, sachant que le FGADO est mieux préparé à répondre à ses obligations.
Environnement : Communes dont l’action doit être adaptée aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral
Lien : D. n° 2024-531, 10 juin 2024 : JO 11 juin 2024
Le décret n° 2024-531 du 10 juin 2024, publié au Journal Officiel le 11 juin 2024, révise la liste des communes concernées par l’adaptation de leur action face aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral. Cette révision fait suite à une mise à jour du décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 modifié, pris en application de la loi sur l’adaptation des territoires littoraux au changement climatique.
Les phénomènes hydrosédimentaires, impliquant le transport et le dépôt de sédiments par l’eau sous l’action des vagues, des marées et des courants, peuvent entraîner une érosion significative des côtes, affectant la stabilité des plages, des falaises et des infrastructures côtières. La gestion de l’érosion littorale est devenue une priorité pour de nombreuses communes situées le long des côtes françaises, en raison de ses impacts économiques, environnementaux et sociaux.
La révision de la liste des communes concernées repose sur des études actualisées de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Ces études ont permis d’identifier les zones les plus vulnérables à l’érosion côtière en tenant compte des tendances climatiques récentes et des projections futures.
Les communes nouvellement ajoutées à la liste doivent désormais adapter leurs plans d’urbanisme et de gestion côtière pour répondre aux risques posés par l’érosion. Ces adaptations peuvent inclure des mesures telles que la restriction de la construction dans les zones à haut risque. Les nouvelles règles peuvent interdire ou restreindre sévèrement les nouvelles constructions dans les zones identifiées comme étant à haut risque d’érosion. Les autorités locales doivent revoir leurs plans locaux d’urbanisme (PLU) pour intégrer ces restrictions, visant à minimiser les dommages potentiels aux propriétés et infrastructures.
Le renforcement des infrastructures existantes est également nécessaire. Les communes doivent mettre en place des programmes de renforcement des infrastructures côtières existantes, comme les digues, les jetées et les protections de rivage. Ces mesures visent à augmenter la résilience des infrastructures face aux phénomènes hydrosédimentaires et à réduire les impacts de l’érosion.
La restauration des écosystèmes naturels est une autre mesure importante. Les projets de restauration des dunes, des mangroves et des zones humides côtières sont encouragés pour renforcer les défenses naturelles contre l’érosion. Ces écosystèmes jouent un rôle dans la stabilisation des sédiments et la protection des côtes contre les vagues et les marées.
La mise en place de systèmes de surveillance et d’alerte est également cruciale. Les communes doivent investir dans des systèmes de surveillance et d’alerte pour suivre les changements côtiers en temps réel. Ces systèmes permettent de détecter rapidement les signes d’accélération de l’érosion et de prendre des mesures préventives pour protéger les zones à risque.
Le décret n° 2024-531 oblige les communes à consulter régulièrement les communautés locales et les parties prenantes, y compris les résidents, les entreprises locales et les associations environnementales. La participation du public est essentielle pour garantir que les mesures prises sont bien comprises, acceptées et soutenues par la communauté.
Les communes déjà présentes sur la liste doivent continuer à mettre en œuvre et à ajuster leurs plans d’action en fonction des nouvelles données et des meilleures pratiques en matière de gestion côtière. L’actualisation de leurs stratégies de gestion est nécessaire pour s’adapter aux évolutions des phénomènes hydrosédimentaires et aux impacts du changement climatique.
L’implication de l’État et des organismes de recherche dans l’accompagnement des communes est renforcée par ce décret. Des financements supplémentaires et des ressources techniques sont mis à disposition pour aider les communes à réaliser les études nécessaires et à mettre en œuvre les projets de protection côtière.
Les effets de ces mesures sur la préservation du littoral et la sécurité des populations locales seront observés sur le long terme.
Environnement : Reconnaissance de catastrophes naturelles pour inondations, mouvements de terrain et vents
Lien : A. n° IOME2413412A, 21 mai 2024 : JO 9 juin 2024
L’arrêté n° IOME2413412A du 21 mai 2024, publié au Journal Officiel le 9 juin 2024, traite de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour des inondations, des mouvements de terrain et des vents violents. Conformément au Code des assurances, ces demandes de reconnaissance ont été examinées pour les dommages causés par ces événements climatiques extrêmes.
Les inondations, souvent provoquées par des pluies intenses et prolongées, peuvent causer des dégâts importants aux habitations, aux infrastructures et aux terres agricoles. Les mouvements de terrain, quant à eux, peuvent résulter de l’érosion, de la saturation des sols en eau ou de la déstabilisation de pentes, entraînant des glissements de terrain et des affaissements de sols. Les vents violents, incluant les tempêtes et les ouragans, peuvent arracher des toitures, déraciner des arbres et endommager gravement les bâtiments et les infrastructures.
L’arrêté précise les communes reconnues en état de catastrophe naturelle pour chacun de ces types de sinistres, permettant ainsi aux habitants et aux entreprises de bénéficier des indemnisations prévues par les contrats d’assurance couvrant ce risque spécifique. La reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle déclenche la mise en œuvre de la garantie catastrophe naturelle, incluse dans les contrats d’assurance habitation, entreprise et automobile.
Pour que les assurés puissent bénéficier de cette reconnaissance, ils doivent respecter certaines démarches et délais. Ils doivent notamment déclarer les dommages subis à leur assureur dans un délai de dix jours suivant la publication de l’arrêté. L’assureur, de son côté, dispose de deux mois pour indemniser les sinistrés à compter de la date de remise de l’état estimatif des biens endommagés ou des pertes subies.
Les procédures d’examen des demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle reposent sur des critères précis et des expertises techniques. Les autorités locales, en collaboration avec les services de météorologie et les instituts de géologie, fournissent des rapports détaillés sur les événements climatiques et leurs impacts. Ces rapports sont évalués par une commission interministérielle, qui décide de l’opportunité de reconnaître ou non l’état de catastrophe naturelle pour chaque commune concernée.
La reconnaissance officielle a des implications importantes pour la gestion des risques et la résilience des territoires. Elle permet non seulement de déclencher les indemnisations nécessaires pour la réparation des dommages, mais elle incite aussi les communes et les particuliers à prendre des mesures préventives pour réduire leur vulnérabilité face à de futurs événements similaires. Les autorités locales peuvent ainsi bénéficier de financements pour des projets de prévention, tels que l’amélioration des systèmes de drainage, la consolidation des sols, et la protection des berges et des pentes.
Cette démarche s’inscrit dans une politique plus large de gestion des risques naturels et de renforcement de la résilience des territoires face aux effets du changement climatique. En effet, l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes impose une adaptation constante des stratégies de prévention et de gestion des risques. Les communes doivent intégrer ces considérations dans leur planification urbaine et leur aménagement du territoire, en concertation avec les services de l’État et les experts en gestion des risques.
La publication de l’arrêté n° IOME2413412A souligne également l’importance de la solidarité nationale dans la prise en charge des catastrophes naturelles. En reconnaissant officiellement l’état de catastrophe naturelle, l’État français manifeste son engagement à soutenir les collectivités locales et les citoyens dans les moments difficiles, en mobilisant les mécanismes d’indemnisation prévus par le système assurantiel.
Les effets de ces mesures sur la résilience des territoires et la prise en charge des sinistrés seront observés à travers les retours d’expérience et les évaluations post-catastrophes. Les communes touchées devront, à l’avenir, renforcer leurs capacités de gestion des risques et améliorer leurs infrastructures pour mieux résister aux aléas climatiques.
Jurisprudence
Construction : Garantie décennale au titre des travaux de mise en conformité : champ d’application
Lien : Cass. 3e civ., 6 juin 2024, n° 23-11.336,
L’arrêt de la Cour de cassation du 6 juin 2024, n° 23-11.336, aborde la question de l’application de la garantie décennale en matière de travaux de mise en conformité. Cette décision est particulièrement pertinente pour clarifier les responsabilités des assureurs dommages-ouvrage et la portée de leur garantie.
Dans cette affaire, le litige portait sur l’obligation de l’assureur dommages-ouvrage de prendre en charge les travaux de mise en conformité d’un ouvrage. Plus précisément, il s’agissait de déterminer si ces travaux entraient dans le champ d’application de la garantie décennale. La garantie décennale, rappelons-le, couvre pendant dix ans les dommages compromettant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination, conformément aux articles 1792 et suivants du Code civil.
L’assureur soutenait que les travaux de mise en conformité, n’ayant pas pour origine un vice ou un défaut compromettant la solidité ou l’usage de l’ouvrage, ne relevaient pas de la garantie décennale. En revanche, les maîtres d’ouvrage arguaient que toute intervention visant à rendre l’ouvrage conforme aux normes en vigueur devait être couverte par l’assureur, indépendamment de l’origine des travaux.
La Cour de cassation, dans son arrêt du 6 juin 2024, a donné raison à l’assureur. Elle a jugé que la garantie décennale ne pouvait être mobilisée pour des travaux de mise en conformité qui ne résultaient pas de dommages affectant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination. Ainsi, la mise en conformité avec des normes ou des réglementations survenues après la réception des travaux, ou même existantes mais non respectées initialement, ne relève pas de cette garantie si ces non-conformités n’entraînent pas les dommages couverts par la décennale.
Cet arrêt s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence constante visant à circonscrire le champ d’application de la garantie décennale. Il confirme que cette garantie est limitée aux dommages affectant la structure ou la destination de l’ouvrage, excluant les interventions qui visent uniquement à respecter des normes ou des exigences réglementaires, sauf si ces dernières sont la cause directe de tels dommages.
Il est essentiel pour les professionnels de la construction et les maîtres d’ouvrage de comprendre cette distinction. La mise en conformité relève souvent de l’obligation contractuelle ou de la garantie de parfait achèvement, mais ne peut être imputée à la garantie décennale sauf en cas de dommages compromettant la solidité ou l’usage. Les implications pratiques de cette décision sont significatives, notamment en ce qui concerne la souscription des assurances et la gestion des risques en matière de construction.
Cette décision invite à une réflexion plus large sur les responsabilités des différents acteurs de la construction face aux évolutions normatives et réglementaires. Elle soulève également la question de la protection des maîtres d’ouvrage et de la couverture des risques qui ne sont pas pris en charge par la garantie décennale. En outre, elle met en évidence l’importance pour les assureurs et les assurés de définir clairement les termes des contrats d’assurance, notamment en ce qui concerne les exclusions et les limites de couverture.
Construction : Prescription de l’action en garantie décennale : application du Code civil
Lien : CE, 7 juin 2024, n° 472662, cté cnes Pays du Sel et du Vermois.
Le district urbain de l’agglomération de Saint-Nicolas-de-Port, devenu la communauté de communes des Pays du Sel et du Vermois, a contracté avec plusieurs entreprises pour la construction d’un centre nautique intercommunal à Dombasle-sur-Meurthe. Parmi ces entreprises, on trouve notamment Atelier Arcos Architecture, la société Irmex (devenue BET Saunier et associés), ainsi que plusieurs autres sociétés et sous-traitants. Bien que l’ouvrage ait été réceptionné et les réserves levées, des désordres ont été constatés. En conséquence, le 17 août 2007, la communauté de communes a demandé la désignation d’un expert par le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, qui a été nommé le 2 janvier 2008.
Le rapport d’expertise a été déposé le 22 juillet 2013. Par une requête du 17 mars 2016, la communauté de communes a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner solidairement ou proportionnellement plusieurs entreprises, dont Atelier Arcos Architecture et Engie Cofely, à lui verser 881 970 euros pour les dommages subis. Le tribunal administratif a partiellement accédé à cette demande par un jugement du 17 décembre 2019, condamnant certaines sociétés tout en rejetant l’action en garantie décennale contre d’autres, jugeant cette action prescrite.
La communauté de communes a fait appel de ce jugement, mais la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté son appel le 2 février 2023. La communauté de communes a alors formé un pourvoi en cassation, lequel est analysé dans le présent arrêt.
Selon l’article 2244 du code civil dans sa version antérieure à la loi du 17 juin 2008, une citation en justice, même en référé, interrompt la prescription uniquement pour les désordres spécifiquement mentionnés dans cette citation et lorsqu’elle émane de celui qui a qualité pour exercer le droit menacé de prescription. La cour administrative d’appel a jugé que les demandes d’extension des opérations d’expertise présentées par des parties autres que la communauté de communes n’avaient pu interrompre le délai de prescription. La communauté de communes soutenait que cette interprétation violait l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, mais ce moyen, nouveau en cassation, a été écarté.
La cour a également jugé que la demande d’extension des opérations d’expertise présentée par la communauté de communes en mars 2008 ne mentionnait pas les désordres affectant les pédiluves extérieurs, lesquels n’ont été signalés qu’en avril 2013. Cette appréciation souveraine de la cour administrative d’appel a conduit à rejeter l’interruption de la prescription pour ces désordres.
Par ailleurs, l’article 2241 du code civil stipule qu’une demande en justice interrompt la prescription. Toutefois, selon l’article 2243, cette interruption est nulle si la demande est définitivement rejetée. La requête de la communauté de communes tendant à engager la responsabilité décennale a été rejetée pour irrecevabilité, un rejet confirmé en appel et en cassation. Ainsi, la cour administrative d’appel a correctement appliqué la loi en refusant à la communauté de communes le bénéfice de l’interruption de la prescription.
En conséquence, le pourvoi de la communauté de communes a été rejeté. Elle a été condamnée à verser 1 000 euros à chaque société impliquée au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Cette décision illustre les exigences strictes de la prescription en matière de responsabilité décennale et la nécessité pour les maîtres d’ouvrage de suivre rigoureusement les procédures judiciaires pour préserver leurs droits. Elle pose des questions sur la manière dont les erreurs procédurales peuvent affecter les recours et souligne l’importance de mentionner précisément les désordres lors des demandes d’expertise pour interrompre valablement les délais de prescription.
Bail commercial : Office du juge dans la fixation du loyer binaire renouvelé
Lien : Cass. 3e civ., 30 mai 2024, n° 22-16.447,
L’arrêt de la Cour de cassation du 30 mai 2024, n° 22-16.447, aborde la question du rôle du juge dans la fixation du loyer binaire renouvelé en matière de bail commercial. Cette décision, destinée à être publiée au rapport, éclaire de manière significative les compétences du juge lorsqu’il est saisi pour fixer le loyer d’un bail renouvelé.
Le loyer binaire, caractéristique des baux commerciaux, est constitué d’une part fixe et d’une part variable, souvent indexée sur le chiffre d’affaires du locataire. Ce type de loyer permet d’ajuster les montants en fonction des performances économiques de l’entreprise locataire, offrant une certaine flexibilité et un partage des risques entre bailleur et locataire. Toutefois, la fixation du loyer renouvelé, en particulier de sa part variable, peut donner lieu à des contentieux lorsque les parties ne parviennent pas à un accord.
Dans cette affaire, le juge a été saisi pour déterminer le montant du loyer binaire à l’occasion du renouvellement du bail commercial. La question principale était de savoir dans quelle mesure le juge peut intervenir dans la fixation de la part variable du loyer, notamment lorsque les critères économiques de référence ont changé ou que les conditions économiques générales se sont détériorées.
La Cour de cassation, dans sa décision, a rappelé que l’office du juge consiste à assurer une fixation du loyer conforme aux stipulations contractuelles initiales, tout en prenant en compte les évolutions économiques pertinentes. Le juge ne peut ignorer les critères de fixation initialement convenus par les parties, mais il doit aussi considérer les réalités économiques contemporaines qui peuvent influer sur la part variable du loyer.
En l’espèce, la Cour a souligné que le juge devait veiller à ce que le loyer binaire reste équilibré et reflète les conditions économiques actuelles du marché. Cela implique une analyse approfondie des éléments financiers présentés par les parties, y compris les performances économiques du locataire et l’évolution des valeurs locatives comparables. Le juge doit ainsi trouver un équilibre entre le respect du contrat initial et l’adaptation aux nouvelles conditions économiques.
Cet arrêt illustre également l’importance de la motivation des décisions judiciaires en matière de fixation de loyers. Une décision bien motivée permet de comprendre les critères retenus par le juge et les raisons de la détermination du loyer, ce qui est crucial pour la sécurité juridique des transactions commerciales. La publication de cette décision au rapport souligne son importance pour la jurisprudence future et l’interprétation des clauses de loyer binaire dans les baux commerciaux.
L’intervention du juge dans la fixation du loyer renouvelé pose des questions sur l’équilibre entre la liberté contractuelle des parties et la nécessité d’une adaptation aux évolutions économiques. Il est crucial que les parties à un bail commercial anticipent ces enjeux et prévoient des clauses claires pour la révision des loyers, incluant des mécanismes de résolution des conflits. De plus, cette décision rappelle l’importance de la transparence et de la précision dans les contrats de bail commercial, afin de minimiser les risques de contentieux lors des renouvellements.
Les implications pratiques de cette décision pour les bailleurs et les locataires sont multiples. Elle incite les parties à être particulièrement vigilantes lors de la rédaction des clauses de loyer binaire et à prévoir des modalités de révision et de résolution des différends adaptées. Par ailleurs, cette jurisprudence invite à une réflexion sur la flexibilité des baux commerciaux et sur les outils contractuels permettant de mieux gérer les fluctuations économiques.
Bail commercial : Acquisition de la clause résolutoire et pouvoir du juge des référés : champ d’application restreint de l’arrêt des poursuites individuelles
Lien : CA Paris, pôle 1, ch. 8, 24 mai 2024, n° 24/01114
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris, pôle 1, chambre 8, du 24 mai 2024, n° 24/01114, traite de la question du pouvoir du juge des référés concernant l’acquisition de la clause résolutoire dans les baux commerciaux, ainsi que du champ d’application restreint de l’arrêt des poursuites individuelles. Cette décision est importante pour clarifier les limites de l’intervention du juge des référés dans ce domaine spécifique.
Dans cette affaire, le juge des référés a été saisi pour constater l’acquisition de la clause résolutoire d’un bail commercial en raison de manquements du locataire. La clause résolutoire, souvent insérée dans les baux commerciaux, permet au bailleur de résilier le bail de plein droit en cas de non-respect par le locataire de certaines obligations contractuelles, comme le paiement des loyers ou le respect de certaines conditions d’utilisation des locaux.
La Cour d’appel de Paris a rappelé que le juge des référés, en vertu de son office, n’a pas le pouvoir de constater l’acquisition de la clause résolutoire. Le juge des référés, dont la compétence est limitée aux mesures urgentes et provisoires, ne peut se prononcer sur le fond du litige, notamment sur la résiliation d’un bail commercial. La constatation de l’acquisition de la clause résolutoire nécessite une appréciation approfondie des faits et du contrat, ce qui relève de la compétence du juge du fond.
En l’espèce, la Cour a restreint le champ d’application du pouvoir du juge des référés, affirmant que la constatation de la clause résolutoire relève exclusivement du juge du fond. Cette restriction est justifiée par la nécessité de préserver les droits de la défense et de garantir une décision prise après un examen complet des arguments et des preuves présentés par les parties.
De plus, la décision met en lumière le champ d’application restreint de l’arrêt des poursuites individuelles en cas de procédures collectives. Lorsqu’une entreprise fait l’objet d’une procédure collective, comme le redressement ou la liquidation judiciaire, l’arrêt des poursuites individuelles vise à suspendre les actions en justice intentées contre le débiteur pour permettre une gestion collective et ordonnée de ses dettes. Toutefois, cette suspension ne s’applique pas automatiquement à toutes les actions et doit être appréciée en fonction de la nature des créances et des procédures engagées.
Cet arrêt a des implications pratiques importantes pour les bailleurs et les locataires en matière de baux commerciaux. Pour les bailleurs, il souligne la nécessité de saisir le juge du fond pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et éviter des procédures dilatoires devant le juge des référés. Pour les locataires, cette décision offre une protection contre des décisions hâtives prises en référé, leur permettant de présenter pleinement leur défense devant le juge du fond.
Société (en général) : Absence de convocation régulière d’un associé (majoritaire) à l’assemblée générale : consécration de la théorie du vote utile
Lien : Cass. com., 29 mai 2024, n° 21-21.559,
L’arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 29 mai 2024, n° 21-21.559, constitue une décision importante concernant la convocation régulière des associés à l’assemblée générale dans une société à responsabilité limitée (SARL) et la consécration de la théorie du vote utile. Cette décision apporte des clarifications essentielles sur la portée et les conséquences des irrégularités dans la convocation des assemblées générales des sociétés.
Dans cette affaire, l’assemblée générale d’une SARL avait été annulée en raison d’une irrégularité dans la convocation d’un associé majoritaire. L’annulation a été prononcée sans que les juges du fond n’aient vérifié si cette irrégularité avait une incidence réelle sur le vote de la délibération, c’est-à-dire sans appliquer la théorie du vote utile. Cette théorie suppose que l’irrégularité n’entraîne pas automatiquement l’annulation de l’assemblée si l’on peut démontrer que le vote de l’associé irrégulièrement convoqué n’aurait pas modifié l’issue de la délibération.
La Cour de cassation a cassé la décision des juges du fond en rappelant que l’annulation de l’assemblée pour irrégularité de convocation doit s’accompagner d’une vérification préalable de l’utilité du vote de l’associé concerné. Autrement dit, il est nécessaire d’évaluer si l’irrégularité a effectivement porté atteinte aux droits de l’associé et influencé le résultat de la décision prise lors de l’assemblée. En l’absence de cette vérification, l’annulation est infondée.
La théorie du vote utile repose sur le principe de proportionnalité et la protection des droits des associés. Elle vise à éviter des annulations systématiques d’assemblées générales pour des motifs formels qui n’ont pas de répercussions substantielles sur les décisions sociales. Cette approche permet de concilier les exigences de régularité formelle avec une certaine souplesse, évitant ainsi des contentieux inutiles et des perturbations dans le fonctionnement des sociétés.
En consacrant la théorie du vote utile, la Cour de cassation souligne l’importance de la substance sur la forme dans le droit des sociétés. Les juges doivent désormais vérifier, dans chaque cas d’irrégularité de convocation, si cette irrégularité a eu un impact réel sur la décision de l’assemblée. Cette jurisprudence incite les sociétés à être diligentes dans la convocation des associés tout en reconnaissant que des erreurs formelles mineures ne doivent pas nécessairement entraîner des conséquences disproportionnées.
Cette décision a des implications pratiques importantes pour la gouvernance des sociétés. Les dirigeants de sociétés doivent s’assurer que toutes les procédures de convocation sont scrupuleusement respectées, mais ils peuvent également être rassurés par le fait que des erreurs formelles sans conséquence substantielle ne mèneront pas systématiquement à l’annulation des décisions prises en assemblée. Pour les associés, cette jurisprudence renforce la protection de leurs droits tout en évitant des litiges fondés sur des vices de procédure purement formels.
Procédures collectives : Inapplicabilité de l’article 14 du Code civil aux procédures collectives à l’encontre d’un débiteur étranger
Lien : Cass. com., 12 juin 2024, n° 22-16.626,
L’arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 12 juin 2024, n° 22-16.626, traite de l’inapplicabilité de l’article 14 du Code civil aux procédures collectives engagées à l’encontre d’un débiteur étranger. Cet arrêt clarifie les conditions d’ouverture des procédures de redressement et de liquidation judiciaire à l’encontre de débiteurs dont le siège social se trouve à l’étranger.
L’article 14 du Code civil dispose que l’étranger, même non résidant en France, peut être cité devant les tribunaux français pour l’exécution des obligations contractées en France. Toutefois, la Cour de cassation a précisé que cet article ne s’applique pas aux procédures collectives visant des débiteurs étrangers.
Dans cette affaire, un créancier avait demandé l’ouverture d’une procédure collective contre une société dont le siège social était situé hors de France. Le créancier se fondait sur l’article 14 du Code civil pour justifier la compétence des juridictions françaises. Cependant, la Cour de cassation a rejeté cet argument, soulignant que les procédures de redressement et de liquidation judiciaire obéissent à des règles spécifiques et autonomes, distinctes des règles de compétence générale énoncées dans le Code civil.
La Cour a rappelé que les procédures collectives, qui incluent le redressement et la liquidation judiciaire, sont régies par le Code de commerce. Les articles L. 620-1 et suivants du Code de commerce stipulent les conditions d’ouverture et de compétence des juridictions françaises en matière de procédures collectives. Ces dispositions prévoient que les juridictions françaises sont compétentes si le centre des intérêts principaux du débiteur est situé en France. Cette notion, alignée sur le règlement européen sur l’insolvabilité, prime sur les règles de compétence générale du Code civil.
Cet arrêt a des implications importantes pour les créanciers cherchant à engager des procédures collectives contre des débiteurs étrangers. Les créanciers doivent démontrer que le centre des intérêts principaux du débiteur se trouve en France, ce qui implique généralement que le débiteur exerce une activité économique substantielle en France. Cette exigence vise à assurer une gestion cohérente des procédures d’insolvabilité au niveau international.
La décision de la Cour de cassation reflète également une volonté de s’aligner sur les normes européennes et internationales en matière de droit des procédures collectives. Elle renforce la sécurité juridique et la prévisibilité des décisions judiciaires en matière d’insolvabilité, en évitant l’utilisation abusive des règles de compétence générale.
Cette jurisprudence appelle les praticiens à une vigilance accrue dans l’analyse des critères de compétence lorsqu’ils envisagent d’ouvrir une procédure collective contre un débiteur étranger. Il est essentiel de bien comprendre et de démontrer le lieu du centre des intérêts principaux du débiteur pour établir la compétence des juridictions françaises.
Procédures collectives : Reconstitution de l’actif du débiteur par la nullité des paiements : pas de compensation avec une créance individuelle
Lien : Cass. com., 12 juin 2024, n° 23-13.360,
L’arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 12 juin 2024, n° 23-13.360, porte sur la question de la reconstitution de l’actif du débiteur en nullifiant les paiements effectués après la cessation des paiements, et précise que ces paiements ne peuvent être compensés avec une créance individuelle. Cette décision clarifie les modalités de reconstitution de l’actif en procédure collective et les implications pour les créanciers et le débiteur.
Selon le Code de commerce, la cessation des paiements est définie comme l’impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Une fois cette cessation constatée, les paiements effectués par le débiteur pour des dettes échues sont susceptibles d’être annulés. L’objectif de cette nullité est de reconstituer l’actif du débiteur afin de permettre une répartition équitable entre tous les créanciers et de favoriser les chances de redressement de l’entreprise.
Dans cette affaire, la nullité des paiements effectués après la cessation des paiements avait été prononcée. Cependant, un créancier contestait cette annulation, arguant qu’il devait pouvoir compenser cette annulation avec une créance individuelle qu’il détenait à l’encontre du débiteur. La Cour de cassation a rejeté cet argument, soulignant que la finalité de la nullité des paiements est la reconstitution de l’actif collectif du débiteur, et non la satisfaction des intérêts individuels des créanciers.
La Cour a ainsi réaffirmé que la compensation entre une créance individuelle et les sommes annulées en raison de paiements postérieurs à la cessation des paiements n’est pas permise. Permettre une telle compensation irait à l’encontre de l’égalité entre les créanciers et compromettrait la reconstitution de l’actif, car cela reviendrait à privilégier certains créanciers au détriment des autres.
Cette décision est en ligne avec les principes fondamentaux des procédures collectives, qui visent à garantir une égalité de traitement entre tous les créanciers et à maximiser les chances de redressement de l’entreprise ou, à défaut, à assurer une liquidation ordonnée. La nullité des paiements effectués après la cessation des paiements est un outil crucial pour éviter le dépérissement de l’actif du débiteur et pour empêcher des paiements préférentiels qui seraient effectués au détriment de la masse des créanciers.
Pour les praticiens du droit des procédures collectives, cet arrêt souligne l’importance de vérifier scrupuleusement la date de cessation des paiements et de s’assurer que tous les paiements effectués après cette date soient examinés pour déterminer leur validité. De même, les créanciers doivent être conscients qu’ils ne peuvent compenser des paiements annulés avec leurs créances individuelles, et doivent plutôt attendre la répartition collective des actifs du débiteur.
Cette jurisprudence pose la question de savoir comment les créanciers peuvent protéger efficacement leurs intérêts lorsqu’ils soupçonnent une situation de cessation des paiements.
Fiscalité : Provision pour dépréciation du fonds de commerce : une valeur actuelle prometteuse
Lien : CAA Toulouse, 23 mai 2024, n° 22TL21736, EURL Pharmacie Lafayette Hôtel Dieu :
La société Pharmacie Lafayette Hôtel-Dieu, créée en 2001 et exploitant une officine de pharmacie à Carpentras, a subi une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017. Au cours de ce contrôle, l’administration fiscale a remis en cause la provision pour dépréciation du fonds de commerce comptabilisée en 2014 et l’a réintégrée au bilan du premier exercice non prescrit. Par conséquent, des rappels d’impôt sur les sociétés ont été notifiés pour les exercices 2015, 2016 et 2017, assortis de pénalités, dont une majoration de 40 % pour l’exercice 2017 selon l’article 1728 du code général des impôts.
La société a partiellement obtenu gain de cause dans sa réclamation auprès de l’administration fiscale, qui a annulé l’amende pour défaut de présentation du fichier d’écritures comptables et les pénalités de retard pour l’exercice 2017. Cependant, la demande de décharge des impositions restantes a été rejetée par le tribunal administratif de Nîmes le 17 juin 2022, décision contre laquelle la société a fait appel.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué concernant la provision pour dépréciation du fonds de commerce, l’article 38 quater de l’annexe III au code général des impôts impose le respect des définitions du plan comptable général, sous réserve de leur compatibilité avec les règles fiscales. L’article 39 du code général des impôts, en lien avec l’article 38 sexies de l’annexe III, précise que les provisions pour dépréciation doivent correspondre à des pertes probables, clairement identifiées et rattachées aux opérations de l’exercice.
La société soutenait que la valeur vénale de son fonds de commerce avait diminué, citant les études de l’organisme Interfimo montrant une baisse des prix de cession des officines en 2014. Cependant, ces données générales et les pondérations subjectives appliquées par la société ne suffisaient pas à justifier la dépréciation spécifique de son fonds de commerce. La seule perte de valeur vénale ne justifie pas une provision si la valeur d’usage reste supérieure à la valeur nette comptable. En l’espèce, la société n’a pas démontré une détérioration de sa situation économique, son chiffre d’affaires et son excédent brut d’exploitation étant en augmentation sur la période examinée.
Ainsi, l’administration fiscale était en droit de remettre en cause la déduction de la provision pour dépréciation du fonds de commerce pour l’exercice 2014. La société ne peut donc contester la réintégration de cette provision et les conséquences sur le déficit reportable de 2016.
Concernant la majoration de 40 %, l’article 1728 du code général des impôts prévoit une majoration de 40 % pour les déclarations tardives non déposées dans les 30 jours suivant une mise en demeure. L’article 244 quater C du code général des impôts permet aux entreprises de bénéficier d’un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, imputé sur l’impôt sur les sociétés. Contrairement à la position de l’administration, ce crédit d’impôt diminue le montant des droits dus et doit être pris en compte pour calculer la majoration de 40 %. La société est donc fondée à demander une réduction de la majoration, déduction faite du crédit d’impôt de 6 837 euros.
La société Pharmacie Lafayette Hôtel Dieu obtient une réduction de la majoration de 40 % au titre de l’exercice 2017. Le jugement du tribunal administratif de Nîmes est réformé en conséquence, et le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Impôt sur la Fortune : IFI et parts de sociétés de personnes pratiquant la location de logements meublés
Lien : TJ Versailles, 30 avr. 2024, n° 22/01600
Madame [D] [Y] épouse [L] et Monsieur [K] [L] sont associés de la société à responsabilité limitée LOKIMO, une entité soumise à l’impôt sur le revenu. Cette société exerce une activité de location de logements meublés, comprenant divers biens immobiliers : quatre chambres dans des résidences étudiantes à [Localité 5] et [Localité 9], onze chambres dans un EHPAD à [Localité 6], ainsi que treize appartements et un local commercial à [Localité 7].
En 2019, les époux [L] ont acquitté l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) pour un montant de 41.771 euros, incluant les parts détenues dans la SARL LOKIMO dans leur déclaration d’IFI. Contestant cette déclaration, ils ont présenté une réclamation contentieuse le 3 décembre 2020, demandant l’exonération de l’IFI sur la base des dispositions de l’article 975, II et V du Code général des impôts (CGI).
L’administration fiscale a rejeté cette réclamation le 8 avril 2021. En réponse, les époux [L] ont assigné la Direction régionale des finances publiques d’Île-de-France et de Paris devant le tribunal judiciaire de Versailles le 16 mars 2022, sollicitant notamment l’annulation de la décision de rejet et la décharge de l’IFI 2019 concernant les parts de la SARL LOKIMO.
Dans leurs conclusions, ils affirment que leur recours est recevable, en soulignant que la décision de rejet, mentionnant une juridiction incompétente, ne fait pas courir de délai de recours. Ils soutiennent que les conditions de l’article 975 du CGI sont remplies, affirmant exercer leur activité principale au sein de la société LOKIMO de manière effective et continue, bien que retraités.
L’administration fiscale, de son côté, argue que le recours est prescrit, l’assignation ayant été signifiée au-delà du délai de deux mois après la décision de rejet. Sur le fond, elle conteste l’exercice effectif d’une activité professionnelle par les époux [L], soulignant l’absence de preuves de leur implication active dans la gestion des biens.
L’article L.199 alinéa 2 du livre des procédures fiscales stipule que le tribunal judiciaire est compétent pour juger des affaires d’IFI. Selon l’article R.199-1 alinéa 1 du même livre, l’action doit être introduite dans les deux mois suivant la notification de la décision de l’administration fiscale. Toutefois, l’article R.421-5 du code de justice administrative précise que les délais de recours ne sont opposables que si mentionnés dans la notification de la décision.
En l’espèce, la décision de rejet mentionnait à tort le tribunal administratif de Versailles au lieu du tribunal judiciaire. Ainsi, le délai de recours de deux mois n’a pas pu valablement courir, rendant les demandes des époux [L] recevables.
Sur le fond, l’article 965 du CGI établit que l’IFI concerne les biens immobiliers et parts de sociétés représentatives de biens immobiliers. L’article 975 du CGI prévoit l’exonération des parts de sociétés exerçant une activité commerciale lorsque le redevable y exerce son activité principale de manière effective. La doctrine administrative précise que cette activité doit être exercée à titre principal, de manière habituelle et constante, et procurer les moyens de satisfaire aux besoins de l’existence.
Les époux [L] soutiennent qu’ils remplissent ces conditions. Cependant, les éléments fournis, tels que les courriels avec le gestionnaire de l’immeuble à [Localité 7] et l’absence de preuves de gestion des autres biens, ne démontrent pas une implication suffisante. Les biens étant gérés par des sociétés tierces et éloignés géographiquement, il n’est pas établi que les époux [L] accomplissent les actes et diligences réelles requises pour être considérés comme exerçant une activité professionnelle à titre principal.
En conséquence, les conditions pour bénéficier de l’exonération prévue par l’article 975 du CGI ne sont pas remplies. La décision de rejet de l’administration fiscale est donc confirmée, et les époux [L] sont condamnés aux dépens, sans qu’il soit fait droit à leur demande de condamnation de l’administration fiscale au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Cette affaire ouvre à la réflexion sur les critères d’appréciation de l’activité professionnelle effective pour l’exonération de l’IFI, notamment dans le contexte de la location meublée, et sur la rigueur nécessaire dans la documentation des diligences réelles accomplies par les associés de sociétés de personnes.
Procédure fiscale : Présomption d’innocence et établissement de l’impôt
Lien : CAA Toulouse, 23 mai 2024, n° 22TL00140
- A… B… a sollicité du tribunal administratif de Nîmes la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités afférentes, pour les années 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2013 et 2014. Cette demande a été rejetée par le tribunal le 19 novembre 2021. En appel devant la cour administrative d’appel, M. B…, représenté par Me Pacini, a contesté ce jugement et a réitéré sa demande de décharge des cotisations et pénalités, invoquant l’irrégularité des opérations de vérification de comptabilité, menées par l’administration dans ses locaux et non à son domicile, ainsi que l’absence de preuve de l’exercice d’une activité occulte et illicite par le vérificateur, en violation du principe de présomption d’innocence.
Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a soutenu que les arguments de M. B… étaient inopérants ou non fondés. La clôture de l’instruction a été fixée au 31 octobre 2023, et l’affaire a été entendue en audience publique le 4 mars 2024.
- B… a fait appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 19 novembre 2021, qui a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu pour les années 2007 à 2014. Ces cotisations résultaient de l’imposition, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, de revenus issus de détournements de fonds.
Concernant la régularité de la procédure d’imposition, l’article L. 68 du livre des procédures fiscales stipule que la procédure de taxation d’office s’applique en cas d’activité occulte, définie par l’article L. 169 comme une activité non déclarée au centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, ou une activité illicite.
L’administration fiscale, informée par les autorités judiciaires de détournements de fonds par M. B…, a utilisé les documents obtenus pour établir l’existence de revenus tirés de cette activité. M. B… n’ayant pas déclaré ces revenus, l’administration a appliqué la procédure d’évaluation d’office, sans nécessité de mise en demeure préalable. Les irrégularités invoquées par M. B…, liées à la vérification de comptabilité, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition, étant donné que la situation d’évaluation d’office n’a pas été révélée par ces opérations de vérification.
Sur le bien-fondé des impositions, l’article 92 du code général des impôts inclut dans les bénéfices non commerciaux les revenus provenant de sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de revenus. Les détournements de fonds, constitutifs de profits illicites, sont donc imposables dans cette catégorie. Les documents de l’enquête judiciaire ont confirmé que M. B… s’était livré à cette activité. En invoquant l’absence de jugement pénal, M. B… ne remet pas en cause la réalité de ces faits, qu’il a reconnus lors des entretiens avec le vérificateur. L’indépendance des procédures fiscale et pénale permet à l’administration d’utiliser les éléments recueillis pour établir l’impôt, sans violer le principe de présomption d’innocence.
Il résulte de ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à contester le rejet de sa demande par le tribunal administratif de Nîmes.
Procédure fiscale : Procédure de redressement contradictoire : redressement ou pas ?
Lien : CAA Toulouse, 23 mai 2024, n° 22TL21167, M. et Mme C.
- D… A… et Mme C… B… épouse A… ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2018. Par un jugement n° 2003578 du 21 mars 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
En appel devant la cour administrative d’appel, M. et Mme A…, représentés par Me André, ont réitéré leur demande de décharge des cotisations primitives d’impôt sur le revenu et de contributions sociales pour l’année 2018, et ont demandé à la cour d’annuler le jugement précédent, de prononcer la décharge des cotisations litigieuses, et de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que le jugement attaqué est irrégulier en raison d’un défaut d’analyse de leur mémoire enregistré le 30 juillet 2021 et d’une insuffisance de motivation. De plus, ils contestent la régularité de la procédure d’imposition au regard de l’article L. 55 du livre des procédures fiscales, et remettent en cause l’interprétation et l’application de l’article 60 de la loi de finances pour 2017 par l’administration fiscale, arguant de son inconstitutionnalité.
Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête, arguant notamment que la demande des requérants concernant les prélèvements sociaux est sans objet et que les moyens soulevés par M. et Mme A… ne sont pas fondés. L’instruction a été clôturée le 26 octobre 2023, et l’affaire a été entendue en audience publique le 4 mars 2024.
- A… a cessé son activité de mandataire judiciaire le 31 décembre 2018 et a bénéficié, pour cette année, d’un crédit d’impôt pour la modernisation du recouvrement. Il a été assujetti à une cotisation primitive d’impôt sur le revenu de 724 666 euros. Estimant que l’ensemble de ses bénéfices non commerciaux déclarés pour l’année 2018 étaient éligibles au crédit d’impôt, M. et Mme A… ont contesté la décision de l’administration fiscale, qui a rejeté leur réclamation préalable le 19 mai 2020.
Concernant la régularité du jugement, M. et Mme A… soutiennent que le tribunal n’a pas analysé leur mémoire en réplique de juillet 2020 et a omis de motiver son jugement en réponse aux moyens qu’ils avaient soulevés. Toutefois, les mentions du jugement attaqué indiquent que le mémoire en réplique a bien été pris en compte par le tribunal, qui a suffisamment motivé sa réponse. Les moyens tirés du défaut d’analyse et de l’insuffisance de motivation doivent donc être écartés.
En ce qui concerne la procédure d’imposition, l’article L. 55 du livre des procédures fiscales prévoit que les rectifications sont effectuées suivant une procédure contradictoire en cas d’insuffisance, d’inexactitude, d’omission ou de dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts. L’administration fiscale n’a pas remis en cause l’exactitude des éléments déclarés par M. A… mais a considéré que certains de ses bénéfices ne devaient pas être pris en compte dans le calcul du crédit d’impôt pour la modernisation du recouvrement, car ils étaient considérés comme des revenus exceptionnels. Le désaccord portait donc sur la qualification de ces revenus, et non sur leur montant, ce qui exclut l’application de la procédure de rectification contradictoire.
L’article 60 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, modifié par l’ordonnance du 22 septembre 2017, instaure le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu à partir des revenus de l’année 2018. Les dispositions transitoires visent à éviter que les contribuables ne paient l’impôt sur le revenu à la fois sur les revenus de 2018 et ceux de 2019. Le crédit d’impôt pour la modernisation du recouvrement a pour objet d’effacer l’impôt dû sur les revenus non exceptionnels de 2018. Pour les travailleurs indépendants, le bénéfice de 2018 est comparé aux bénéfices des trois années précédentes pour déterminer s’il est exceptionnel. Le crédit d’impôt est plafonné en fonction du bénéfice le plus élevé des trois années de référence.
En l’espèce, le bénéfice non commercial de M. A… en 2018 dépassait celui des années précédentes. L’administration a donc considéré la différence comme un revenu exceptionnel non éligible au crédit d’impôt pour la modernisation du recouvrement. M. et Mme A… soutiennent que l’accroissement du bénéfice de 2018 résulte de la cessation de l’activité de M. A… et d’un surcroît d’activité, mais ils n’apportent pas de précisions suffisantes pour démontrer que cet accroissement ne résulte pas de l’encaissement de produits des années précédentes. En outre, les requérants ne peuvent utilement contester le montant du crédit d’impôt initialement accordé sur cette base.
Enfin, le moyen tiré de l’inconstitutionnalité des dispositions de l’article 60 de la loi du 26 décembre 2019 ne peut être retenu, car les requérants n’ont pas contesté l’ordonnance refusant la transmission de leur question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat.
En conclusion, M. et Mme A… ne sont pas fondés à contester le jugement du tribunal administratif de Montpellier. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’État soit condamné à verser une somme aux requérants au titre des frais liés au litige. La cour administrative d’appel rejette donc la requête de M. et Mme A… et confirme le jugement du tribunal administratif de Montpellier.
Doctrine Administrative
Plan d’Epargne en Action (PEA) : BSPCE et PEA : annulation des commentaires administratifs
Lien : BOI-RPPM-RCM-40-50-20-20, 16 mai 2024. – BOI-RSA-ES-20-40-20, 16 mai 2024
Par une décision du 8 décembre 2023, le Conseil d’État a jugé que les bons de souscriptions de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE) peuvent être logés dans un Plan d’Épargne en Actions (PEA), annulant ainsi les commentaires administratifs contraires de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP). Cette décision s’inscrit dans un contexte où le cadre réglementaire et fiscal des PEA et des BSPCE fait l’objet d’évolutions et d’interprétations diverses.
Le PEA est un dispositif d’épargne en actions qui permet de bénéficier, sous certaines conditions, d’une exonération d’impôt sur le revenu des gains réalisés, à condition que les sommes investies soient maintenues pendant au moins cinq ans. Les BSPCE, quant à eux, sont des instruments financiers octroyés aux salariés et dirigeants de start-ups, leur permettant d’acquérir des actions de leur entreprise à un prix fixé à l’avance, avec un avantage fiscal.
Historiquement, les commentaires administratifs des services fiscaux, notamment ceux contenus dans le BOI-RPPM-RCM-40-50-20-20 et le BOI-RSA-ES-20-40-20 en date du 16 mai 2024, ont exclu la possibilité d’intégrer les BSPCE dans un PEA. Ces commentaires se fondaient sur une interprétation stricte de la réglementation relative aux actifs éligibles au PEA, considérant que les BSPCE, en tant que produits dérivés, ne répondaient pas aux critères d’éligibilité définis par le Code monétaire et financier.
Cependant, le Conseil d’État, dans sa décision du 8 décembre 2023, a estimé que cette interprétation restrictive n’était pas justifiée par les textes en vigueur. Le Conseil a rappelé que l’article L. 221-31 du Code monétaire et financier, qui régit les actifs éligibles au PEA, n’exclut pas explicitement les BSPCE. En outre, il a souligné que l’objectif du PEA est de favoriser l’investissement en actions et la participation des salariés au capital des entreprises, objectifs auxquels les BSPCE contribuent pleinement.
Cette décision a plusieurs implications significatives. D’abord, elle ouvre la possibilité pour les détenteurs de BSPCE d’optimiser leur fiscalité en les intégrant dans un PEA, bénéficiant ainsi des avantages fiscaux associés. Ensuite, elle impose à la DGFiP de réviser ses commentaires administratifs pour se conformer à cette nouvelle jurisprudence, entraînant une modification du BOI-RPPM-RCM-40-50-20-20 et du BOI-RSA-ES-20-40-20.
Il est également à noter que cette décision pourrait encourager les start-ups à utiliser davantage les BSPCE comme outil de motivation et de fidélisation de leurs collaborateurs, sachant que ceux-ci pourront désormais tirer un avantage fiscal supplémentaire en les logeant dans un PEA. Toutefois, les contribuables doivent rester vigilants quant à l’évolution de la réglementation et aux éventuelles nouvelles directives de la DGFiP qui pourraient clarifier les modalités pratiques de cette intégration.
Banque : Mise à jour de l’analyse sectorielle des risques de blanchiment et financement du terrorisme par l’AMF
Lien : AMF, actualités, 10 juin 2024 (Risques)
L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a publié une nouvelle version de son analyse sectorielle des risques (ASR) de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme (BC-FT). Cette analyse, dont la première édition est parue en 2019, s’inscrit dans le cadre de l’approche par les risques recommandée par le Groupe d’action financière (GAFI). Elle vise à décliner pour les professionnels placés sous la supervision de l’AMF l’analyse nationale des risques (ANR) mise à jour et publiée le 14 février 2023 par le Conseil d’orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme (COLB).
L’approche par les risques est importante pour les dispositifs de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT). Cette approche requiert une compréhension approfondie des risques BC-FT à tous les niveaux, tant pour les entités assujetties que pour les autorités de supervision.
L’ASR de l’AMF évalue les différents risques de BC-FT auxquels sont exposés plusieurs secteurs sous sa supervision, notamment :
- Le secteur de la gestion d’actifs, en distinguant la gestion collective d’instruments financiers, le capital-investissement, la gestion immobilière et la gestion individuelle de portefeuille ;
- Les conseillers en investissements financiers ;
- Les activités du dépositaire central de titres ;
- Le secteur des actifs numériques.
Suivant la méthodologie de l’analyse nationale, l’ASR identifie et évalue les menaces et vulnérabilités transversales telles que les fraudes et escroqueries, les usurpations d’identité, les atteintes à la probité et la corruption, et la prolifération. Elle confronte ces menaces aux facteurs d’atténuation des risques existants, qu’ils soient réglementaires ou liés à la qualité des dispositifs de LCB-FT observés par l’AMF. Cette évaluation s’appuie sur les informations collectées auprès des professionnels concernés, les constats des contrôles conduits par l’AMF et les rapports de TRACFIN.
La note globale attribuée à chaque secteur résulte de l’interaction entre les menaces identifiées et la robustesse des mesures d’atténuation. Désormais, cette note est appréciée sur une échelle de cotation à quatre niveaux : faible, modéré, élevé et très élevé.
L’objectif principal de cette analyse sectorielle des risques est d’orienter les activités de supervision et de contrôle de l’AMF en matière de LCB-FT. Elle vise également à guider les professionnels sous supervision dans leurs propres évaluations des risques, tout en rappelant que ces analyses sectorielles ne remplacent pas les évaluations plus détaillées que les entités doivent réaliser en fonction de la nature des produits et services offerts, des canaux de distribution utilisés et des caractéristiques de leurs clients.
Cette évolution reflète une volonté d’améliorer la compréhension et la gestion des risques de BC-FT dans les secteurs supervisés par l’AMF, en renforçant les dispositifs existants et en s’assurant que les pratiques de LCB-FT soient à la hauteur des menaces et vulnérabilités identifiées. Toutefois, il reste crucial pour les professionnels de maintenir des évaluations continues et spécifiques à leurs activités pour répondre efficacement aux risques de BC-FT. Les futures orientations de l’AMF en matière de supervision et de contrôle pourraient ainsi continuer à évoluer en réponse aux dynamiques du secteur financier et aux nouvelles typologies de risques.
Projets, propositions et rapports
Logement : Le CESE lance des pistes pour faciliter le logement des saisonniers
Lien : CESE, actualités, 30 mai 2024 (Saisonniers)
Le secteur du tourisme, de l’hôtellerie-restauration, de l’animation socioculturelle et sportive, ainsi que de l’agriculture, requiert une main d’œuvre saisonnière importante. Ces activités, essentielles pour l’économie de nombreux territoires, nécessitent des solutions de logement adaptées pour les travailleurs saisonniers, souvent confrontés à des difficultés de logement.
Le logement est un facteur déterminant pour attirer des saisonniers et assurer la continuité des activités économiques dans les territoires concernés. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié un avis en mai 2024, soulignant l’importance de mettre en place une stratégie nationale du logement pour les travailleurs saisonniers, en s’appuyant sur les initiatives existantes et en encourageant des solutions innovantes.
Les disparités entre les territoires imposent une approche adaptée aux spécificités locales. Une plateforme participative a été mise en place pour recenser les exemples de solutions de logement, recueillir les facteurs de succès et les difficultés rencontrées. La commission Territoires, agriculture et alimentation a également effectué des déplacements sur le terrain, notamment à Rennes, pour s’inspirer des initiatives locales et évaluer les freins existants.
Les Conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) ont contribué à cet avis en apportant un éclairage territorial indispensable sur le sujet du logement des travailleurs saisonniers ou en mobilité. Le manque de pilotage clair et de lisibilité des initiatives existantes, ainsi que l’insuffisance de mutualisation entre les différents acteurs, sont identifiés comme des obstacles majeurs. Pour répondre à ces enjeux, le CESE propose une approche transversale articulée autour de quatre axes principaux.
Le premier axe vise à renforcer la cohérence des politiques publiques en désignant un délégué interministériel du logement saisonnier pour coordonner l’élaboration d’une stratégie nationale. Les régions, par l’intermédiaire du président du Conseil régional et du préfet de région, auraient un rôle de coordination pour organiser la synergie entre les différents acteurs et mettre en œuvre le droit à expérimenter des solutions innovantes adaptées aux spécificités locales.
Le deuxième axe consiste à créer un cadre d’action favorable à l’hébergement des saisonniers. Les logements pour travailleurs saisonniers devraient être éligibles aux mêmes aides et dispositifs que les logements permanents, tels que MaPrimeRénov’. Une meilleure régulation des meublés de tourisme dans les zones tendues et la remise sur le marché des logements vacants sont également préconisées.
Le troisième axe vise à accompagner le développement des projets collectifs mutualisés. Les projets collectifs permettent de mutualiser les solutions de logement et de mobilité, répartissant ainsi les charges financières et renforçant la viabilité économique des projets. Ces projets, portés par des associations ou des groupements d’employeurs, devraient être soutenus par des aides spécifiques. La coordination intersectorielle et le dialogue social sont essentiels pour mettre en place des solutions de logement innovantes.
Le quatrième axe consiste à répondre aux attentes des salariés saisonniers. De nombreux saisonniers ignorent leurs droits et les dispositifs d’aide disponibles. La diffusion de vade-mécums adaptés et la meilleure répertorisation des offres de logements disponibles permettraient de réduire le taux de non-recours aux aides existantes et d’organiser la mise en relation entre les offres et les saisonniers.
L’amélioration de l’offre de logement pour les travailleurs saisonniers est nécessaire pour assurer la continuité des activités économiques dans les territoires dépendants de la main-d’œuvre saisonnière. Une approche transversale, coordonnée et soutenue par des initiatives locales, permettra de répondre aux défis posés par le logement des saisonniers, en favorisant à la fois l’attractivité des territoires et le bien-être des travailleurs.
Chiffres et Statistiques
Immobilier : Les baisses de prix ont concerné tous les logements de 2022 à 2023
Notaires du Grand Paris, communiqué, 25 avril 2024
Les baisses annuelles des prix des appartements en Ile-de-France oscillent entre -3,8% et -8,3% selon le nombre de pièces et les grands secteurs géographiques, entre les 4es trimestres 2022 et 2023.
Elles sont très légèrement plus marquées sur les petits logements (-7,4% pour les studios et -7,1% pour les 2 pièces en Ile-de- France). C’est particulièrement vrai à Paris (-7,8% pour les studios et -7,2% pour les deux pièces).
Europe : Baisse des taux directeurs de la BCE
Le Conseil des gouverneurs a décidé d’abaisser les trois taux d’intérêt directeurs de la BCE de 25 points de base, en réponse à l’amélioration des perspectives d’inflation et à la modération de l’inflation sous-jacente. Malgré cette amélioration, les tensions internes sur les prix restent fortes, principalement en raison de la croissance des salaires. Les projections de l’inflation et de la croissance économique pour 2024-2026 ont été ajustées à la hausse. Par ailleurs, le Conseil réduira le portefeuille de titres du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP) de 7,5 milliards d’euros par mois au second semestre 2024.
Immobilier
Trait de Côte : Recul du trait de côte et recul de la propriété privée
Si le scénario pessimiste du GIEC anticipe une hausse du niveau de la mer de près d’un mètre d’ici 2100, le marché immobilier sur la zone littorale semble, de son côté, relativement indifférent à cette menace. Cependant, le recul du trait de côte, qui représente le mouvement de la limite entre la mer et la terre, pose des défis considérables en termes de gestion des propriétés privées.
La montée des eaux, combinée à l’érosion côtière, pourrait entraîner une perte progressive des terres littorales, affectant directement les propriétaires fonciers. Cette situation soulève des questions juridiques complexes concernant la propriété des terrains engloutis par la mer. En France, le Code civil stipule que le domaine public maritime s’étend jusqu’à la limite atteinte par les plus hautes mers en l’absence de perturbations exceptionnelles. Par conséquent, lorsque le trait de côte recule, les terrains privés peuvent être intégrés au domaine public maritime, entraînant la perte de droits de propriété pour les propriétaires concernés.
Les enjeux sont d’autant plus importants que les zones littorales sont souvent des territoires à forte densité urbaine et touristique. La valeur immobilière de ces zones, malgré les risques environnementaux croissants, demeure élevée, ce qui reflète une déconnexion entre la perception des risques climatiques et la réalité économique. Les investisseurs et les propriétaires semblent sous-estimer l’impact potentiel du changement climatique sur la pérennité de leurs biens.
Plusieurs mesures peuvent être envisagées pour anticiper et atténuer les conséquences du recul du trait de côte. Parmi celles-ci, on trouve les politiques de relocalisation des activités et des habitations, la construction d’ouvrages de protection côtière, ou encore l’adaptation des règles d’urbanisme pour limiter les nouvelles constructions dans les zones à risque. La loi littoral et d’autres réglementations spécifiques visent déjà à encadrer les constructions en zone côtière, mais leur application stricte et leur adaptation aux nouvelles projections climatiques restent des défis majeurs.
Il est également crucial d’améliorer la sensibilisation des propriétaires et des investisseurs aux risques liés à l’érosion côtière et à la montée des eaux. Une meilleure information pourrait encourager des décisions d’investissement plus prudentes et une planification à long terme plus résiliente.
La gestion de ces enjeux nécessite une approche intégrée, combinant expertise juridique, urbanistique et environnementale. Les collectivités locales, en première ligne face à ces défis, doivent être soutenues par des politiques nationales cohérentes et des ressources adéquates pour mettre en œuvre des stratégies d’adaptation efficaces.
Enfin, l’évolution des pratiques d’assurance et des mécanismes de compensation pour les pertes de propriété pourrait jouer un rôle clé dans la gestion des conséquences économiques du recul du trait de côte. Une réflexion approfondie sur ces aspects est nécessaire pour assurer une juste répartition des coûts liés aux risques climatiques.
La question du recul du trait de côte, et de ses implications sur la propriété privée, illustre de manière concrète les défis posés par le changement climatique.
Responsabilité civile : Les troubles anormaux du voisinage : le régime de responsabilité fait son entrée dans le Code civil !
La loi n° 2024-346 du 15 avril 2024 visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels a introduit un nouvel article 1253, alinéa 1er du Code civil consacré aux troubles anormaux du voisinage. Cette réforme marque une étape importante dans la reconnaissance et la gestion des conflits de voisinage en droit français, en codifiant un régime de responsabilité déjà largement développé par la jurisprudence.
L’introduction de cet article dans le Code civil vise à offrir une meilleure protection aux victimes de troubles anormaux du voisinage et à clarifier les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité. Le texte consacre ainsi le principe selon lequel « Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ». Ce principe, auparavant élaboré par les juges, trouve désormais une assise légale explicite.
Les troubles anormaux du voisinage englobent divers désagréments qui dépassent les inconvénients normaux que l’on peut attendre dans les relations de voisinage, tels que les nuisances sonores, olfactives, visuelles ou encore les vibrations. La nouveauté réside dans la reconnaissance législative de ce principe et dans la formalisation des critères permettant de déterminer le caractère anormal des troubles.
Pour être qualifié de trouble anormal, l’inconvénient doit être excessif, c’est-à-dire qu’il doit excéder les limites des désagréments ordinaires et supportables entre voisins. Le juge apprécie le caractère anormal au cas par cas, en tenant compte de plusieurs éléments comme l’intensité, la durée, la répétition, le moment et le lieu du trouble. La localisation des biens concernés joue également un rôle déterminant, un même trouble pouvant être jugé normal en zone industrielle mais anormal en zone résidentielle.
L’article 1253, alinéa 1er, instaure une responsabilité sans faute. En d’autres termes, il n’est pas nécessaire de démontrer une faute de la part de l’auteur du trouble pour engager sa responsabilité. Il suffit de prouver l’existence du trouble anormal et son lien avec l’activité du voisin pour obtenir réparation. Cette responsabilité objective vise à faciliter l’indemnisation des victimes.
La réforme renforce également les moyens de prévention et de résolution amiable des conflits de voisinage. Elle encourage le recours à la médiation et à d’autres modes alternatifs de règlement des litiges. En incitant les parties à trouver des solutions amiables, le législateur espère réduire la judiciarisation des conflits de voisinage et promouvoir une coexistence pacifique entre voisins.
L’introduction de l’article 1253, alinéa 1er, dans le Code civil marque une avancée significative dans la protection des droits des riverains et la clarification du régime de responsabilité en matière de troubles anormaux du voisinage. Cette évolution législative répond aux besoins contemporains de protection de la qualité de vie et de l’environnement immédiat des individus.
Cependant, des questions subsistent quant à l’application pratique de ces nouvelles dispositions. Les critères de l’anormalité du trouble, bien que désormais codifiés, nécessiteront une interprétation par les juges pour définir précisément les contours de cette responsabilité. De plus, l’équilibre entre le droit à la tranquillité des voisins et le droit à l’exercice des activités économiques et sociales devra être soigneusement préservé.
Cette codification invite à une réflexion sur la manière de concilier développement urbain et respect de la qualité de vie des habitants. Comment les municipalités et les promoteurs immobiliers pourront-ils anticiper et prévenir les troubles anormaux du voisinage dans leurs projets futurs ? Quels seront les impacts de cette nouvelle réglementation sur les pratiques professionnelles et les comportements individuels en matière de voisinage ?
L’évolution du droit des troubles anormaux du voisinage, désormais inscrite dans le Code civil, ouvre la voie à une meilleure gestion des relations de voisinage, tout en soulevant des défis d’application et d’interprétation que les juridictions auront à relever dans les années à venir.
Avantages matrimoniaux : La réforme de l’article 265 du Code civil par la loi « justice patrimoniale »
Résurrection de la participation aux acquêts et réveil de l’autonomie de la volonté en droit des régimes matrimoniaux
La loi du 31 mai 2024 sur la justice patrimoniale a réformé l’article 265 du Code civil, apportant des modifications significatives au droit des régimes matrimoniaux. Cette réforme vise à rééquilibrer les avantages matrimoniaux et à renforcer l’autonomie de la volonté des époux en matière de gestion de leur patrimoine.
La modification de l’article 265 du Code civil, en particulier son alinéa 2, marque un retour en force de la participation aux acquêts, un régime matrimonial qui permet de mieux répartir les bénéfices économiques réalisés par les époux durant le mariage. Cette résurrection de la participation aux acquêts vient en réponse à une demande croissante de flexibilité et d’équité dans la gestion des biens matrimoniaux.
L’alinéa 2 de l’article 265, tel que révisé, précise que les avantages matrimoniaux, c’est-à-dire les dispositions favorables dans le cadre du régime matrimonial, ne sont pas automatiquement révoqués par le divorce, sauf décision contraire des époux ou du juge. Cette disposition vise à respecter davantage l’autonomie de la volonté des époux, leur permettant de conserver certains avantages matrimoniaux post-divorce si tel est leur souhait.
En outre, la réforme introduit des mesures visant à faciliter la mise en œuvre de la participation aux acquêts. Les époux peuvent désormais plus facilement opter pour ce régime, qui offre une meilleure protection du conjoint économiquement plus faible, en assurant une participation équitable aux acquisitions réalisées pendant le mariage. La loi clarifie également les modalités de calcul et de répartition des acquêts, simplifiant ainsi la procédure et réduisant les risques de contentieux.
La réforme de l’article 265 du Code civil a également pour objectif de moderniser et d’adapter le droit des régimes matrimoniaux aux évolutions sociétales. En renforçant l’autonomie de la volonté des époux, la loi reconnaît la diversité des situations familiales et patrimoniales, et offre un cadre juridique plus flexible et adapté aux besoins contemporains.
Les modifications apportées par cette loi soulignent également l’importance de l’information et de la transparence. Les époux doivent être pleinement informés des conséquences de leur choix de régime matrimonial et des avantages ou inconvénients qui en découlent. Les notaires jouent un rôle clé dans ce processus, en conseillant les époux et en veillant à ce que leurs décisions soient éclairées et conformes à leurs intérêts.
La réforme de l’article 265 du Code civil par la loi du 31 mai 2024 sur la justice patrimoniale représente une avancée importante pour le droit des régimes matrimoniaux. Elle rétablit la participation aux acquêts comme un régime équitable et renforce l’autonomie de la volonté des époux. Cette réforme répond aux besoins de modernisation et d’adaptation du droit des régimes matrimoniaux, en offrant une plus grande flexibilité et en assurant une meilleure protection des intérêts patrimoniaux des époux.