Le potin de la semaine
Le potin de la semaine : Une nouvelle étape pour Adeline :
Aujourd’hui, c’est un article un peu spécial que nous vous proposons, car il s’agit d’une annonce qui me tient particulièrement à cœur : Adeline, a été nommée experte judiciaire dans les nomenclatures C18, C19, D02 et D07 !
Il y a des nouvelles qui méritent d’être célébrées, et celle-ci en fait assurément partie. Ceux d’entre vous qui connaissent Adeline savent à quel point elle est passionnée, rigoureuse et impliquée dans son travail. Depuis des années, elle consacre son énergie à se perfectionner dans des domaines pointus, et aujourd’hui, cette reconnaissance officielle vient couronner son expertise.
Qu’est-ce que cela signifie, concrètement ?
Adeline a maintenant l’honneur de rejoindre le cercle des experts qualifiés dans ces domaines stratégiques. C’est une étape importante , et une très belle reconnaissance de son travail .
Pourquoi suis-je si fière ?
Parce que, comme vous le savez, être experte judiciaire, ce n’est pas simplement avoir une expertise technique. C’est aussi avoir cette capacité à comprendre et à interpréter des situations complexes, à offrir une vision claire et précise, tout en maintenant une éthique irréprochable. C’est exactement ce qu’Adeline fait au quotidien, et a fait bénévolement pendant 8 ans dans le cadre de ces fonctions quand elle été magistrate au Tribunal de Commerce. Et je ne peux m’empêcher de me réjouir de la voir franchir cette nouvelle étape.
Une aventure qui continue
Ce n’est que le début pour Adeline ! Cette nomination marque un tournant, mais elle est bien loin d’être une fin en soi. Elle continue de se perfectionner, d’apprendre, et de s’investir toujours davantage dans son domaine (immobilier commercial et fonds de commerce).
Pour ceux qui suivent son parcours depuis le début, c’est une suite logique à son parcours technique et sectoriel (CHR). Et pour moi, en tant que sœur, c’est un véritable moment de fierté.
Félicitations à ma sœur !
Les actualités
Promesse unilatérale de vente – Clauses et conditions
La promesse unilatérale de vente, voilà un contrat qui, sous ses airs simples, recèle une mécanique redoutable et parfois source de tensions. L’affaire en question, conclue dans les années 1970, nous invite à explorer les obligations contractuelles à long terme, et notamment la question essentielle : jusqu’où s’étend l’engagement du promettant ?
Reprenons les faits. En 1971, une promesse unilatérale de vente est conclue : le promettant s’engage à vendre un terrain au bénéficiaire ou à ses ayants droit, sous certaines conditions, notamment un délai prorogé jusqu’à un an après l’ouverture d’une rocade à proximité. Les années passent, les protagonistes initiaux disparaissent, mais l’engagement demeure. En 2011, cependant, le promettant, probablement lassé de l’attente, déclare la promesse caduque. En 2016, le bénéficiaire, resté patient, décide de lever l’option, convaincu que les conditions prévues sont réunies. La rocade étant sur le point d’être mise en service, il s’adresse au promettant pour obtenir le transfert de propriété. Devant l’absence de réponse, le litige est inévitable.
Plongeons dans les textes. À l’époque des faits, les articles 1101, 1134 et 1142 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance de 2016, viennent structurer l’analyse. L’article 1101 pose les bases du contrat comme engagement des parties. L’article 1134 en fait une loi particulière pour ceux qui y souscrivent. Quant à l’article 1142, il pose une limite : une obligation de faire, si elle n’est pas exécutée, ne se traduit pas par une contrainte à agir mais par des dommages-intérêts. C’est sur cette dernière disposition que s’appuie la cour d’appel pour rejeter la demande de transfert forcé de la propriété. Une analyse cohérente à l’époque, mais qui sera mise à mal par la Cour de cassation dans une décision ultérieure.
En effet, dans un revirement notable, la Cour de cassation, en 2021, revoit sa position sur les promesses unilatérales de vente. Elle affirme que ces promesses contiennent déjà, dès leur signature, tous les éléments essentiels du contrat définitif : le consentement du vendeur, le bien concerné, et le prix. Par conséquent, dès que le bénéficiaire lève l’option, le contrat est formé. Ce qui signifie que la rétractation du promettant, même avant la levée de l’option, ne saurait empêcher la réalisation forcée de la vente. Cette position s’écarte donc de l’application stricte de l’article 1142, pour renforcer la sécurité juridique des engagements contractuels.
Un autre point de tension dans cette affaire concerne le prix. L’article 1591 du Code civil impose que le prix d’une vente soit déterminé et sérieux. La cour d’appel avait estimé que la validité du prix devait s’évaluer à la date de la levée de l’option, en 2016. Et là, elle avait jugé que les évolutions du marché rendaient le prix initial irréaliste, concluant à la nullité de l’acte. Mais, là encore, la Cour de cassation n’est pas de cet avis. Selon elle, la vileté du prix, c’est-à-dire son caractère dérisoire, doit s’apprécier à la date de la promesse. En effet, c’est à cette date que les parties fixent leurs engagements, y compris celui concernant la contrepartie financière.
L’arrêt de la Cour de cassation, qui casse la décision de la cour d’appel, repose donc sur une idée forte : la promesse unilatérale de vente est un avant-contrat ferme et précis, qui engage le promettant dès sa signature, sauf stipulation contraire. Une rétractation ou une relecture des conditions ultérieures, qu’il s’agisse du prix ou d’autres éléments, ne saurait remettre en cause cet engagement.
Cette affaire, bien qu’ancienne dans ses faits, est d’une pertinence toujours actuelle. Elle questionne la gestion des promesses dans le temps long, où les conditions économiques et les relations entre parties peuvent profondément évoluer. Elle invite à réfléchir sur la rédaction des promesses : comment anticiper des situations similaires ? Doit-on prévoir des clauses pour éviter les litiges, ou miser sur la fermeté des engagements comme garantie de stabilité ?
Ce cas montre que si les promesses unilatérales de vente sont souvent perçues comme de simples préliminaires, elles n’en sont pas moins des actes engageants, parfois pour des décennies. Un rappel, aussi, que le droit est à la fois une affaire de lettres et de circonstances, où chaque mot compte, et où chaque délai, chaque clause, mérite toute l’attention.
Bail rural : Transmission
L’affaire soumise à la Cour de cassation illustre une problématique récurrente dans le domaine des baux ruraux : l’articulation entre les règles de reprise pour exploitation et celles relatives au contrôle des structures agricoles. Cette affaire, jugée le 16 mai 2023 par la cour d’appel de Versailles, met en lumière les conditions restrictives imposées par le Code rural et de la pêche maritime pour les opérations de reprise et leur soumission à la déclaration ou à l’autorisation préalable.
Le litige naît d’une décision de M. [M] [J] de donner congé à son fils, M. [R] [J], qui exploitait les terres familiales en vertu d’un bail rural. Ce congé, motivé par une reprise pour exploitation au profit d’un autre fils, M. [T] [J], a été contesté par M. [R] [J] devant le tribunal paritaire des baux ruraux, lequel a annulé le congé. La décision, confirmée par la cour d’appel, repose sur une analyse rigoureuse des dispositions du Code rural relatives aux conditions de mise à disposition des terres agricoles.
Le cœur du débat réside dans l’interprétation des articles L. 331-1 et L. 331-2 du Code rural et de la pêche maritime, qui régissent le contrôle des structures agricoles. Ces textes distinguent deux régimes principaux : l’autorisation préalable et la déclaration préalable. Le régime de la déclaration préalable est réservé à certaines situations, notamment lorsque le bien agricole à exploiter est transmis par donation, location, vente ou succession d’un parent ou allié jusqu’au troisième degré (article L. 331-2, II).
Dans cette affaire, la cour d’appel a jugé que M. [T] [J], bénéficiaire désigné de la reprise, ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de ce régime. La raison principale en est l’absence de transmission du bien selon l’une des quatre modalités prévues par le texte. La cour a relevé que M. [T] [J] proposait de mettre en valeur les terres dans le cadre d’un prêt à usage ou en tant qu’indivisaire des biens, mais que ces modalités ne figurent pas parmi celles ouvrant droit à la déclaration préalable. Ainsi, en vertu de l’interprétation stricte de l’article L. 331-2, II, le congé pour reprise a été déclaré nul.
Un autre élément clé de la décision repose sur le droit d’usufruit. Conformément aux articles 578 et 582 du Code civil, l’usufruit confère au titulaire le droit de jouir du bien, sous réserve d’en préserver la substance. En l’espèce, la cour a constaté que M. [M] [J], père du bénéficiaire désigné, avait conservé l’usufruit des terres agricoles. Cela signifie que M. [T] [J], en tant que nu-propriétaire, ne disposait d’aucun droit de jouissance immédiat sur les terres, condition pourtant nécessaire pour pouvoir prétendre à l’exploitation au titre de la déclaration préalable.
La Cour de cassation, saisie du pourvoi, a confirmé cette analyse. Elle a rappelé que le droit transmis par succession, donation, vente ou location doit, à lui seul, permettre l’exploitation effective du bien agricole. En l’absence de ce droit, la mise en valeur des terres par le bénéficiaire de la reprise n’est pas conforme aux exigences du Code rural, rendant ainsi le congé irrégulier.
Cette affaire met en lumière l’importance de bien maîtriser les règles complexes encadrant la reprise pour exploitation dans les baux ruraux. Le contrôle des structures, conçu pour garantir une utilisation rationnelle des terres agricoles, impose des conditions strictes qui doivent être respectées à la lettre. Le cas échéant, comme ici, la nullité du congé peut être prononcée, avec des conséquences importantes pour les parties.
Elle interroge également sur la nécessité d’adapter ces règles à des situations de gestion familiale, où les modalités de transmission des biens ne coïncident pas toujours avec les exigences légales. Une réflexion pourrait être engagée sur la souplesse à accorder aux transmissions intra-familiales, dans le respect des objectifs d’aménagement et de structuration de l’espace agricole.