Le potin de la semaine
Chez ADMA, on ne se contente pas d’empiler les rapports et de noircir des tableaux. On sort aussi de notre tanière. Direction : formations, séminaires, colloques et autres réjouissances du monde immobilier. Parce que, oui, on aime apprendre. Mais on aime encore plus les pauses-café ( y a pas que du café … quand je pense que l’on n’a même pas pu gouter à la Poire Manguin à Avignon !).
Pas tant pour la caféine (enfin… un peu quand même), mais pour ce qui s’y dit et pour les rencontres : les expériences des uns, les galères des autres, et parfois même une bonne idée à ramener au bureau.
Ces moments d’échanges ce sont aussi l’occasion de mettre un visage sur un nom (heureusement qu’il y a le badge), de revoir un notaire croisé en visio, de découvrir que derrière un promoteur un peu rugueux se cache un amateur de pâtisseries orientales ou que certains avocats ont de l’humour (oui, ça arrive).
On y va pour se former, certes. Mais on vient aussi avec notre petit baluchon d’astuces maison : comment faire parler un règlement de copropriété qui date de Minitel, comment traiter un écart de valorisation de 80 % entre deux expertises sur le même local, ou comment garder son calme quand on vous dit que le bail n’a jamais été signé mais qu’il engage tout de même les parties ou encore pour expliquer à des confrères qu’il est plus sage d’horodater ses photos lors d’une visite.
Et le reste du temps ? On adore quand on nous appelle pour un éclairage sur tel article obscur ou un avis sur un cas tordu (c’est ce qui nous fait avancer … le fameux mouton à 5 pattes). Que ce soit un confrère, un avocat, un administrateur de biens, un mémorialiste ou un étudiant perdu dans les méandres de la fiscalité des sociétés civiles, on décroche avec plaisir. (Bon, sauf si c’est pendant notre déjeuner … mais même là, vous avez une chance.)
Ces échanges, ces partages, ces petits bouts de conversation impromptue, c’est ce qui fait aussi la richesse de notre métier. L’expertise ne se résume pas à une base de données ou à un barème : elle se construit aussi dans l’interaction. Et à la fin, on repart souvent avec plus de questions que de réponses (et de nouveaux copains). Et c’est très bien comme ça.
On vient de se former sur le ZAN et voilà déjà le TRACE ….
PS : Le rappel de la vente en réméré ? C’est suite à une question restée sans réponse dans l’émission des Grosses Têtes. On ne pouvait pas laisser passer ça.
« Vendre un bien sans (vraiment) lui dire adieu : le réméré, cette vente qui vous laisse une clé sous le paillasson »
La vente en réméré, prévue aux articles 1659 à 1673 du Code civil, est une forme particulière de vente assortie d’une faculté de rachat. En termes simples, le vendeur se réserve le droit de reprendre son bien, moyennant le remboursement du prix principal, des frais, et éventuellement de certaines indemnités. Il ne s’agit pas ici d’un prêt déguisé – attention à ne pas franchir la ligne rouge de l’usure – mais bien d’une vente avec une porte de sortie, encadrée juridiquement. Ce mécanisme, bien que d’apparence désuète, a conservé toute son utilité, notamment dans des situations de difficultés financières passagères.
En pratique, la vente en réméré s’adresse souvent à des propriétaires en tension de trésorerie, souhaitant disposer rapidement de liquidités tout en conservant l’espoir de reprendre ultérieurement la propriété de leur bien. Le bien est vendu, l’argent est versé, mais le vendeur garde la faculté d’exercer son droit de rachat dans un délai maximum de cinq ans, comme le prévoit l’article 1660 du Code civil. Tant que cette clause est en vigueur, l’acquéreur est juridiquement tenu de restituer le bien au vendeur si ce dernier exerce valablement son droit de rachat.
La clause de réméré doit impérativement être insérée dans l’acte de vente ; à défaut, elle est réputée inexistante. Et le vendeur, pour retrouver la propriété, doit rembourser non seulement le prix initial, mais également, en vertu de l’article 1673, les frais de vente, les frais nécessaires et utiles, ainsi que, le cas échéant, les fruits perçus par l’acquéreur. Il est donc primordial de bien appréhender le coût global d’un réméré, qui peut être bien plus élevé qu’un simple crédit.
Du point de vue de l’acquéreur, la situation est également particulière. Il devient propriétaire du bien, mais sous condition résolutoire, ce qui limite sa liberté d’en disposer librement pendant la durée du réméré. Il lui est notamment interdit de céder le bien sans informer clairement son acquéreur de l’existence du droit de rachat, sous peine d’être rattrapé par les effets de la clause résolutoire.
La jurisprudence encadre sévèrement les dérives. Dans un arrêt du 24 juin 2021 (Cass. 3e civ., n° 18-19.771), la Cour de cassation a requalifié une vente à réméré en pacte commissoire prohibé, dès lors que les conditions financières – prix de vente largement sous-évalué et prix de rachat assorti de pénalités équivalentes à un taux d’intérêt usuraire – révélaient en réalité un crédit déguisé. L’acte a été annulé. La Cour veille ainsi à ce que le réméré ne serve pas de cheval de Troie à des opérations de financement en dehors du cadre protecteur du Code de la consommation.
Cela étant, elle admet que cette requalification ne s’impose pas lorsqu’il s’agit d’un vendeur professionnel, parfaitement informé des implications juridiques et financières. Ainsi, dans un arrêt du 1er octobre 2020 (Cass. 2e civ., n° 19-17.668), elle a validé une opération de réméré au motif que le vendeur en avait une pratique habituelle, et qu’il agissait en connaissance de cause.
Autre précision utile : le vendeur ne reprend pas automatiquement la possession du bien dès qu’il manifeste son intention de racheter. Il doit avoir effectivement réglé les sommes dues. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 8 novembre 2018 (Cass. 3e civ., n° 14-25.005), précisant que le transfert de propriété ne peut intervenir qu’après versement intégral du montant arrêté par le juge en cas de désaccord.
Ainsi, bien encadré, le réméré peut être un outil de sortie de crise temporaire. Mais à manier avec prudence, tant du côté du vendeur que de l’acquéreur. Car en matière de vente sous condition résolutoire, les illusions de sécurité juridique ne résistent pas toujours à l’examen des clauses financières et à la vigilance du juge.
Entre rigueur nationale et réalité locale : la bascule de ZAN à TRACE
Chez ADMA, on ne se contente pas de scruter les mètres carrés et les taux de rendement. On garde aussi un œil attentif sur ce qui bouge du côté des lois. Surtout quand elles touchent à ce qui, justement, ne devrait plus trop bouger : la bétonisation. La proposition de loi dite « TRACE », adoptée par le Sénat le 18 mars 2025, s’inscrit dans cette veine. Elle ajuste, sans renier, les objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols, en tentant de réconcilier planification nationale et réalité des territoires.
Derrière l’acronyme un peu télégraphique – pour Trajectoire de Réduction de l’Artificialisation Concertée avec les Élus – se cache une tentative de compromis. Un texte qui reconnaît que si l’objectif final du « zéro artificialisation nette » (ZAN) en 2050 reste intangible, l’étape intermédiaire, elle, mérite quelques ajustements. La réduction de moitié du rythme de bétonisation d’ici 2031, prévue par la loi Climat et Résilience d’août 2021, est ainsi repoussée à 2034. Mieux : elle sera régionalisée. À chaque région de tracer sa propre trajectoire de réduction pour la période 2024-2034. La logique change : on part du terrain, pas du sommet.
En parallèle, le texte entérine la poursuite d’une méthode de calcul basée sur la consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers (Enaf), là où la loi Climat prévoyait de passer, dès 2031, à un comptage plus “réaliste” de l’artificialisation via les usages du sol. Autrement dit, on garde pour l’instant un outil imparfait, mais connu, qui permet notamment d’exclure certains types de constructions (comme les bâtiments agricoles ou les fameuses dents creuses en ville).
Ce recentrage sur les territoires s’accompagne d’une série de mesures de souplesse. Les communes pourront ouvrir à l’urbanisation jusqu’à 20 % de leur enveloppe locale, seuil extensible sur accord préfectoral. Les documents d’urbanisme auront un peu plus de temps pour intégrer ces évolutions. Et les spécificités des territoires dits “à part” (Corse, outre-mer) sont reconnues par des délais dérogatoires.
La proposition de loi apporte aussi des clarifications utiles sur les grands projets, dits « PENE » (projets d’envergure nationale et européenne), qui sont définitivement exclus des quotas locaux et régionaux. Une manière de ne pas faire peser sur les collectivités des choix qui leur échappent. Et si l’État reste maître d’ouvrage de ces projets, il est désormais prié de faire preuve de davantage de sobriété foncière.
Le texte prévoit également, pour quinze ans, la non-prise en compte de certaines opérations dans les quotas d’artificialisation : installations industrielles, projets d’énergies renouvelables, logements sociaux dans les communes carencées… La volonté affichée est claire : ne pas freiner l’investissement dans des secteurs jugés prioritaires, tout en maintenant une trajectoire globale vertueuse.
Certains projets anciens (ZAC ou grandes opérations d’urbanisme lancées avant 2021) pourront être imputés à la décennie précédente (2011-2021), ce qui les « neutralise » aux yeux des quotas actuels. Une manière de ne pas pénaliser les collectivités qui ont lancé leurs projets dans les temps, mais se retrouvent prises entre deux réformes.
Autre point notable : la mutualisation. Celle des aires d’accueil des gens du voyage à l’échelle régionale, mais aussi celle de la fameuse “garantie communale de développement” d’un hectare, pour éviter le gel du foncier dans certaines communes. Et puis celle, encore, des bâtiments scolaires ou des centres de recyclage, désormais classés comme projets d’intérêt général ou régional, et donc, dans certains cas, sortis du décompte.
Dernier élément, mais non des moindres : le renforcement du rôle des élus communaux. Ils seront mieux représentés dans les futures conférences régionales de sobriété foncière et pourront, le cas échéant, demander à une région de revoir ses objectifs. En somme, on inverse (un peu) la hiérarchie, ou du moins on reconnaît que l’aménagement du territoire se pense aussi à l’échelle de la commune.
Reste à voir si cette proposition, pensée comme un assouplissement pragmatique, sera suivie d’effets. L’Assemblée nationale doit encore l’examiner. Mais une chose est sûre : la question de l’artificialisation n’est pas qu’un débat de chiffres. C’est un jeu d’équilibre entre le droit, la réalité économique et la géographie concrète des territoires. Et comme toujours, chez ADMA, on suivra la suite de près.