Le potin de la semaine
Location saisonnière : entre interdictions et contournements, un pari risqué
Un ami vient d’acheter un logement avec l’objectif d’en faire de la location saisonnière. Problème : la copropriété interdit cette activité et des mentions restrictives figurent clairement dans l’acte d’achat. Pourtant, il reste convaincu qu’il pourra mener à bien son projet, quitte à contourner ces interdictions. Une situation qui illustre les tensions croissantes autour de la location courte durée et la multiplication des réglementations destinées à encadrer ce marché.
À l’instar de villes comme Paris, Marseille ou Nice, la municipalité de Sète a récemment intensifié sa lutte contre les locations touristiques non déclarées en s’attaquant aux fameuses boîtes à clé. Ces dispositifs, souvent accrochés à du mobilier urbain, permettent aux locataires d’accéder facilement aux logements sans rencontrer le propriétaire. Mais leur prolifération a conduit plusieurs municipalités à prendre des mesures strictes pour les éradiquer.
Depuis quelques jours, des agents municipaux patrouillent dans les rues de Sète pour faire retirer ces boîtiers fixés sur des rampes, des barrières, des bancs ou des panneaux de signalisation. Un autocollant est apposé sur chaque boîte illégale, informant son propriétaire qu’il dispose de quinze jours pour l’enlever. Passé ce délai, la municipalité procèdera elle-même au retrait et les déposera au commissariat, où les propriétaires devront les récupérer sur présentation d’une pièce d’identité et d’un titre de propriété.
Outre le retrait des boîtes à clé, les contrevenants s’exposent à des sanctions financières. En cas de non-respect de l’arrêté municipal, une amende de 150 € peut être infligée. De plus, la mairie souhaite limiter la prolifération des meublés de tourisme en imposant aux propriétaires une déclaration obligatoire sur une plateforme dédiée. Des villes comme Paris et Marseille vont encore plus loin en interdisant carrément aux propriétaires de résidences secondaires de louer leur bien sur des plateformes comme Airbnb.
Face à ces réglementations de plus en plus strictes, les propriétaires de meublés de tourisme doivent redoubler de vigilance. Ignorer ces règles peut conduire à des sanctions financières, voire à des procédures judiciaires. Quant à notre ami investisseur, il ferait bien de reconsidérer son projet avant de se heurter aux interdictions de sa copropriété et aux nouvelles restrictions municipales.
La rescision pour lésion : un contrôle strict de l’équilibre contractuel
Un homme âgé décide de vendre un terrain constructible pour une somme qu’il juge correcte. Cependant, après la signature du compromis de vente, il dépose une demande de permis de construire pour ce même terrain, pensant ainsi pouvoir en accroître la valeur. Le permis est refusé, mais entre-temps, il estime que le prix fixé dans le compromis est trop bas et refuse de réitérer la vente. Convaincu d’avoir été lésé, il entend invoquer la rescision pour lésion afin d’obtenir l’annulation ou la réévaluation du prix de la transaction.
En matière de vente immobilière, le mécanisme de la rescision pour lésion constitue une protection pour le vendeur lorsqu’il cède un bien à un prix manifestement trop bas. Ce principe, codifié aux articles 1674 et suivants du Code civil, permet à un vendeur d’obtenir l’annulation ou la réévaluation d’une vente si le prix convenu est inférieur de plus des sept douzièmes à la valeur réelle du bien au moment de la transaction.
Un arrêt de la Cour de cassation (Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 21 septembre 2022, 21-15.125), illustre parfaitement l’application stricte de ce mécanisme. Dans cette affaire, des héritiers avaient cédé un terrain à la société publique locale Territoire d’Innovation dans le cadre d’un projet d’aménagement d’une zone d’activités. Estimant que la vente avait été conclue à un prix nettement inférieur à la valeur réelle du terrain, les vendeurs ont invoqué la rescision pour lésion et sollicité une expertise judiciaire afin de prouver l’existence d’une sous-évaluation manifeste.
La Cour de cassation rappelle ici que selon l’article 1675 du Code civil, l’évaluation de la lésion doit se faire en fonction de l’état et de la valeur du bien au jour de la vente. L’expertise versée aux débats par les vendeurs a été rejetée, car elle reposait sur une estimation dite « à rebours », prenant en compte la valeur du terrain une fois aménagé, plutôt que son état réel au moment de la cession.
En outre, la Cour a relevé que les références produites par les vendeurs concernaient des cessions amiables et des indemnisations d’expropriation, dont les méthodes de calcul diffèrent de celles applicables en droit commun des ventes immobilières. Elle en a conclu que les demandeurs ne rapportaient pas la preuve de faits suffisamment graves et vraisemblables pour établir la lésion, rejetant ainsi leur demande.
Cet arrêt confirme l’exigence d’une rigueur méthodologique dans l’appréciation de la lésion et souligne la nécessité pour les vendeurs d’apporter des éléments de comparaison pertinents et conformes aux prescriptions légales. L’application du mécanisme de la rescision pour lésion demeure donc soumise à une interprétation stricte, rendant essentielle la consultation d’un expert immobilier avant toute action judiciaire.
Conflit de copropriété autour d’un système de chauffage commun : retour sur un arrêt de la cour d’appel
Dans une copropriété où deux résidences partagent une même chaudière, des désaccords peuvent survenir quant à la répartition des charges et à la gestion des équipements communs. L’affaire opposant les syndicats des copropriétaires de deux résidences mitoyennes illustre parfaitement ces tensions et la complexité du droit de la copropriété.
L’origine du litige remonte à plusieurs décennies, lorsque le promoteur des immeubles a prévu une seule chaudière pour les deux copropriétés, installée dans le sous-sol de l’une des résidences. Ce système commun a longtemps fonctionné sans contestation, mais au fil des années, des déséquilibres ont émergé. Une consommation excessive de combustible et des disparités dans la répartition des charges ont conduit l’un des syndicats à exiger le découplage du système de chauffage et d’eau chaude sanitaire.
En 2018, le syndicat des copropriétaires de la résidence a assigné en justice celui de la résidence mitoyenne afin d’obtenir la séparation des installations. Il avançait que cette situation générait un surcoût et une répartition inéquitable des charges, demandant en conséquence une refonte des grilles de répartition.
Le tribunal judiciaire de La Rochelle, saisi de l’affaire en première instance, a rejeté la demande de découplage, considérant qu’une servitude d’usage avait été établie entre les copropriétés, leur imposant ainsi une gestion conjointe de la chaudière. Le syndicat des copropriétaires de la résidence a interjeté appel de cette décision, arguant de l’absence de titre formel consacrant une telle servitude.
La cour d’appel a confirmé le jugement de première instance en retenant plusieurs éléments déterminants. D’une part, elle a constaté que des assemblées générales des copropriétaires avaient voté, à plusieurs reprises, l’entretien et le renouvellement du matériel en commun, traduisant une acceptation tacite du système de chauffage partagé. D’autre part, elle a relevé que la copropriété demandeuse n’avait pas apporté la preuve d’un déséquilibre injustifié dans la répartition des charges.
Cependant, la Cour de cassation, saisie de l’affaire, a cassé l’arrêt d’appel en rappelant que les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues ne peuvent s’établir que par titre. Or, dans ce dossier, les procès-verbaux d’assemblées générales ne suffisaient pas à caractériser une volonté claire et non équivoque d’établir une servitude conventionnelle perpétuelle.
Cet arrêt rappelle aux copropriétaires l’importance de formaliser toute convention portant sur l’usage et l’entretien des équipements communs afin d’éviter des contestations futures. L’affaire sera rejugée par la cour d’appel de Bordeaux, qui devra statuer sur l’opportunité du découplage du système de chauffage et d’eau chaude sanitaire des deux résidences